k-pax, la route (28-2-2023)
Non invité / Non invited (1-2-2023)
k-pax, l'étoile (31-12-2022)
L'équilibre (11-12-2022)
Rose et rond (8-12-2022)
Extrait d’analyse de la légende de Sedna (31-10-2022)
Burning sage (28-10-2022)
Le feu et l'eau (20-10-2022)
The kampaku, the shikken and the elephant (6-10-2022)
Le rêve (27-9-2022)
Carpe (26-9-2022)
Ne pas comprendre (22-9-2022)
La cape (17-9-2022)
La vérité je m’en fiche (8-9-2022)
Entre-lacs (22-7-2022)
9ème diaphonie (28-5-2022)
Le chasseur et l’Ourse (22-4-2022)
La course (22-2-2022)
Aleph (6-1-2022)
Nord (1-1-2022)
Les cercles (suite bis) (29-12-2021)
Les cercles (suite) (29-12-2021)
Les cercles (29-12-2021)
Prologue (27-12-2021)
Ophélie (18-12-2021)
Gorges du Verdon, ciel orageux (12-12-2021)
Rome (8-12-2021)
Afrique occidentale, XIIIe siècle (5-12-2021)
Montagnes de Hongrie, nuit d'hiver (2-12-2021)
Forêt de sapins dense, Suisse (30-11-2021
Hiestopptakuckt (1-11-2021)
Andrée (30-10-2021)
Al-Sahra (14-9-2021)
Pietas et Culpa (2-9-2021)
Ère (1-9-2021)
Enfermement (20-8-2021)
Inoculer (13-8-2021)
La fascination du miroir (1-8-2021)
Ce que dit le robot (21-7-2021)
Les cent ciels (23-6-2021)
L'envie (6-5-2021)
Mars Lucens (3-4-2021)
Le bourdon et le scarabée (19-3-2021)
La reine des voleurs (23-2-2021)
Sorbonne solitude (23-2-2021)
Cocon sidéral (19-2-2021)
Le Pendu (15-2-2021)
Je m'appelle Albert, je suis l'arbre à nids (13-2-2021)
Casper (10-2-2021)
11 (31-1-2021)
58 (28-1-2021)
A Marie (3-1-2021)
La mélancolie de mes 3 amis (2-1-2021)
Langage et liberté (6-12-2020)
Le kampaku, le shikken et l'éléphant (12-11-2020)
Oudjat (11-11-2020)
Wow (6-11-2020)
La chaîne des mondes (29-10-2020)
Marcel (24-10-2020)
Extrait d’analyse du Rayon Vert de Jules Verne (14-10-2020)
Dancing Star (12-10-2020)
Anagrammes narcissiques (12-10-2020)
Tao (10-10-2020)
Rita Zeemann (4-10-2020)
L'oubli (4-10-2020
L’Etre de matière (2-10-2020)
Un château de soufre plus imprenable que fort (28-9-2020)
Origine (27-9-2020)
La guerre du Condor (16-9-2020)
La petite danse (12-9-2020)
La fin de la publicité ? (24-8-2020)
The host of seraphim, 1988 (9-8-2020)
Plage (7-8-2020)
Le Minitel de 2025 (7-8-2020)
La lune rouge (7-8-2020)
Drôle d'affaire... (7-8-2020)
Echiquier (5-8-2020)
Syntonie, dernier mouvement (5-8-2020)
Les archives effondrées de Cologne (4-8-2020)
herMésie (1-8-2020)
Le sale air du salarié (1-8-2020)
J’ai fait un rêve (22-7-2020)
Lettre osée d'un homme usé (22-7-2020)
Lettre ouverte d'une très vieille dame (4-7-2020)
Entropie, drôle de nom pour une drôle de théorie (4-7-2020)
28-2-2023
k-pax, la route
la route qui t'attend est faite de pierre et de terre, elle sillonne à travers bois, longe les côtes, mène à une colline, d'où tu verras la grande montagne se dresser au loin. le chemin vers son sommet n’est alors plus tracé mais arrivé à ce point tu le connais sans te tromper. tu iras en courant rejoindre la glace bleue de sa cime, l'air froid t'habillera de givre et le soleil en voisin reflètera le feu dans ton regard.
avant même que l'ivresse ne te saisisse, tu auras quitté cette Terre. et la montagne sera plus belle que jamais.
1-2-2023
Non invité
Dans le 1er cercle céleste le plus proche de l’axe polaire, se trouve la sereine constellation du Cygne.
Plus loin à la périphérie, lorsque le ciel d’été dévoile une nuit de noir étincelant, celui qui fut le 13ème du zodiaque se tient puissamment silencieux. Et Rassalhague l’étoile de l’homme regarde Deneb l’étoile de l’oiseau.
Leur histoire n’a jamais été écrite, elle survole votre ciel et vos vies ; mais aujourd’hui une voix vous parvient.
Pourquoi la vie n’est pas comme dans mes poésies ?
Pourquoi je vois le monde comme il n’est pas ?
Je suis enfermé.
Sûrement pas à ma place dans ce monde.
Flotter entre 2 infinis de matière et de temps et perpétuellement expérimenter la corruption et la fuite…
Je n’aspire qu’à le quitter, ce monde.
Chercher à comprendre l’univers…
Assurer la longévité des individus et la pérennité de l’espèce…
Ce sont des motifs grotesques lorsqu’on n’aime ni son décor ni sa condition.
Ils sont pourtant inscrits au plus profond de la programmation génétique.
Une sorte d’enthousiasme originel incorruptible. Comme une innocence stupide.
La voie de la sagesse? C’est une vanité pour enfants crédules.
Les sages ne sont que des vieux sans illusion.
Forcément tristes ou impatients d’en finir.
L’amour ? C’est un mensonge.
Il transporte le coeur vers un paradis qu’il croit partagé.
Mais ce n’est que le miroir des angoisses, un arc-en-ciel pour celui qui regarde la pluie,une oeillère pour pouvoir courir.
Et moi…
J’ai voulu courir.
Vers toi.
J’ai été celui qui retenait le serpent qui voulait te mordre.
Nos étoiles s’attiraient.
Mais l’indifférence de ton vol, à côté de Vega l’éblouissante, m’emplissait de mélancolie.
J’ai voulu maîtriser ce qui ne pouvait l’être.
D’un geste j’ai tué l’amour, l’espoir et la sagesse.
Ils m’ont rayé de la carte du ciel.
Tu étais le Cygne qui porte Deneb.
Je suis le Serpentaire, et sur mon front Rassalhague.
Je suis l’invisible. Le 13ème.
Non invited
In the 1st celestial circle, the one closest to the polar axis, is the serene constellation of Cygnus.
Farther on the outskirts, when the summer sky reveals a night of sparkling black, the one who was the 13th of the zodiac stands mightily silent. And Rassalhague the star of the man looks at Deneb the star of the bird.
Their story has never been written, it flies over your sky and your lives; but today a voice reaches you.
Why life is not like in my poems?
Why do I see the world as it is not?
I am locked up.
Certainly out of place in this world.
Floating between 2 infinites of matter and time and perpetually experiencing corruption and flee…
I only want to leave this world.
Seek to understand the universe...
Ensure the longevity of individuals and the sustainability of the species...
These are grotesque patterns when you don't like neither the scenery nor your condition.
Yet they are enshrined in the depths of genetic programming.
A kind of incorruptible original enthusiasm. Like a stupid innocence.
The path of wisdom? It is a vanity for gullible children.
The wise are only old people without illusions.
Necessarily sad or impatient to end it.
Love? It is a lie.
It carries the heart to some paradise that is believed to be shared.
But it is only the mirror of anguish, a rainbow for those who watch the rain, a blinder that makes you run.
And me…
I wanted to run.
Towards you.
I was the one who held back the snake that wanted to bite you.
Our stars attracted each other.
But the indifference of your flight, next to dazzling Vega, filled me with melancholy.
I wanted to control what could not be.
In one gesture I killed love, hope and wisdom.
They wiped me off the celestial map.
You were the Swan carrying Deneb.
I am the Serpentarius, and on my forehead stands Rassalhague.
I am the invisible.
The 13th.
31-12-2022
k-pax, l'étoile
S’il entre dans ta vie, commence à courir.
S’il danse, ressens son rythme,
S’il te regarde, admire-le.
S’il prend ta main, écoute son coeur battre,
S’il veut t’emmener, ne t’arrête pas de courir.
Ne t’arrête pas de courir, les yeux dans le ciel, car cette étoile file.
11-12-2022
L'équilibre
Louvart docile, tu te vois à présent déchirer la main de tes frères de tes crocs vifs et impatients. L'équilibre sera peut-être ta voie, tu n'en es pas encore sûr. Il te faut visiter les hauts sommets et les abîmes autour. Grisants, ils ne s'accommodent pas des demi-mesures et s’accompagnent de l’absolue dématérialisation et de solitude héroïque. L’équilibre est plus douloureux et n'est que maîtrise. Tout ce que tu détestes. Connaître l'oscillation et ses pôles étourdissants pour ressentir ce geste qui dessine le seul point d'équilibre acceptable pour une âme vaillante.
8-12-2022
Rose et rond
Poème écrit il y a très longtemps, navigant sur le parallèle entre un mal-être existentiel et un mieux-être éclairé par le doux visage d’un bébé.
Rose et rond.
Lundi 18h, néon grésillant à peine gênant dans l'inondation de lumière blanche et de lignées de métal bien ordonnées. Con-di-tion-né, é-ti-que-té, sé-lec-tion-né. Encaissé et consommé. Ce matin-là, je n'ai pas envie d'ouvrir les yeux sur la douceur du jour qui s'annonce, cette sérénité m'agresse et m'isole dans mon malaise. Où est la touche harmonique de mon clavier ? Mon unisson n'est qu'un hérisson... 1 jour passé, la nature est toujours aussi effrontément belle autour de mon mécanisme grippé. J'engloutis le mini BN à la fraise, je ne sais pas faire mieux de ce petit visage goguenard que je défroisse d'un coup de langue... Ca ira mieux avec lui dans mon ventre.
Rose et rond.
L'heure du goûter est arrivée accompagnée de nausées. A côté de mon bras pale et perforé, le mur blanc tout brillant d'aseptisant miroite un sourire accroché sur une robe blanche. De petites ailes poussent à ses commissures, il se déplie et n'est déjà plus ici bas... Je le suis vers la cime. Je reviens sur mes pieds. Je veux bien voir ce qui vibre tout autour, je comprends ton rouage implacable mais pas si froid quand je fais corps avec toi. Nature ensorceleuse, intimidante au loin et nourrissante en son sein. Mon sein, le mien, gonfle pour toi et je ne me préoccupe plus de ma condition, je vis et j'avance, je m'émerveille de ta beauté. Tout va mieux depuis que tu es passé par mon ventre.
31-10-2022
Extrait d’analyse de la légende de Sedna
[...] Sedna est une déesse des peuples du grand Nord qui incarne la puissance de la mer. Elle fut victime de son père et de son époux et la légende qui l’entoure est cruelle.
Il est grandement question de la fuite dans son mythe : elle a voulu fuir son père en se précipitant dans le mariage, mais pleurant sur sa pauvre vie d’épouse maltraitée isolée sur une île, elle se fit entendre auprès de son père qui vint la chercher pour fuir son époux. Ce dernier déploya sa colère sur la mer et l’embarcation des fuyards. Ne pensant qu’à se sauver lui-même, le père de Sedna voulut la jeter à la mer pour avoir plus de chance de survie, mais Sedna s’agrippa à la barque, alors son père lui trancha les doigts puis les mains. De chacun de ses doigts jaillirent des baleines, des dauphins et mille animaux marins qui vinrent peupler les océans. La légende rapporte que lorsque la mer est aujourd’hui déchaînée, c’est dû à la colère de Sedna qui a ses cheveux emmêlés et qu’elle ne peut démêler puisqu’elle n’a plus de mains.
Ce conte comporte de nombreuses métaphores, dont certaines sont des codes usuels dans les traditions anciennes de tous les peuples (le symbole de l’eau, des mains, des cheveux emmêlés, de la noyée, de la barque liée à la mort, le magnétisme avec le sort jeté comme un aimant pour faire revenir ou la plainte d’un enfant qui aimante le père ; etc).
Le plus étonnant dans ce conte est que Sedna a porté des fruits en totale inconscience. Elle a mené une vie de douleurs, d’échappées, de fatalités, d’isolement, de dépendances, de refus de lâcher prise et de colères. Elle souffre encore et toujours dans les flots marins (symbolisant son inconscient). Pourtant sous ses yeux et dans sa chair, le monde du silence a fait éclore les plus beaux animaux marins. La baleine est pour les peuples du Nord l’animal sacré qui porte la sagesse et la spiritualité du monde et participe à son équilibre. Et ce conte nous dit juste que ce trésor est à portée de.... main.
28-10-2022
Burning sage
You behave like a boor.
Your words are tyrants.
Filled with the emptiness of all the love you don't have for yourself.
7 days of getting drunk with other spirits, other arms.
So as to forget.
Forget my despair of no longer being a bit yours.
Forget how your soul sparkles with celestial army carrying your steps.
20-10-2022
Le feu et l'eau
Tu me quittes et je sombre.
Tu es un fou flamboyant, une flamme sous le vent.
Jusqu'à nulle part, je ne voulais que toi.
6-10-2022
The kampaku, the shikken and the elephant
This short tale is about a time encounter in old Japan. KAMPAKU was the name of the emperors in Japan (9th to 19th cent. AD).
SHIKKEN designated the chiefs of the Shoguns (12th to 19th cent.) who ensured the military and civil government of the country.
Toyotomi Hideyoshi was Kampaku in the 16th century, often named « Hiyoshi-maru ».
Hojo Yasutoki was Shikken in the 13th century, one of his names was Kongo.
The french version of this poem can be read on the date of November 12th 2020.
Hiyoshi-maru was walking along a sandy path lined with pebbles, his steps traced light furrows that the wind did not move.
His right hand was carrying a 6-ray beaming lamp. He was holding his other hand in the folds of his kimono. A Paulownia flower was adorning one side of his waistband.
Kongo was walking along a soil road lined with woods, his steps were cadencing a succession of balanced footprints that dust did not cover. His hands were each holding a saber of equal caliber.
Hiyoshi-maru and Kongo met.
The kampaku: I was part of your house, I know your arm, Kongo.
The shikken: You shall call me Kana, by the choice of the mind, and not by that of the father.
The kampaku: Who of us is the elephant?
The shikken: Is it a monkey questioning reason?
The kampaku: I am the force that leads the way.
The shikken: I am the balance that settles down the lane before it takes shape.
The kampaku: Can a monkey follow reason? No more likely than two brothers would take the same route. Nor can the wife honestly walk in her husband's track. Why do our steps meet?
The shikken: Do you think you are walking on Iwatayama*?
The kampaku: No more than you think you are in Arashiyama*.
The shikken: The elephant carries us both, and we only walk through the furrows of its wrinkled skin. Can you see it now?
The kampaku: I see thousands of paths like ours that have never been drawn and that have existed from all eternity.
Hiyoshi-maru and Kongo put down their attributes.
They were now considering the elephants walking.
* Iwatayama is the monkey mountain and Arashiyama is the bamboo forest both located west Kyoto.



27-9-2022
Le rêve
Lignes écrites à l’hiver 2021, après plusieurs mois à expérimenter un cerveau qui ne répond plus correctement. Il s’y lit l’inquiétude du vide et de la perte, à la veille de faire cet IRM pour lequel on m’a annoncé la probable rencontre avec un hôte non désiré ou peut-être « juste » pimenté de SEP. Au final, rien de tout cela, la tempête inexpliquée a fini par passer sans qu’on sache la turbine qui l’avait activée. Restent ces lignes, témoin étrange d’un cri blanc.
Viviane a posé sa main sur l’écorce du grand cèdre
Viendras-tu me chercher dans mon rêve enfermée ?
Le chateau au fond du lac ne m’amuse plus, je ne veux que toi,
Tant, que je te sens tout autour sans te voir, es-tu là ?
Suis-je endormie, suis-je morte, je tourne et caresse la boucle d’illusion entre les dimensions,
Chaque nuit en ce lieu inconnu du rêve sans mémoire, qui un jour malpoli claquera sa trame, tu diffuses ta présence. En es-tu l’architecte ou le visiteur, viens-tu ou vais-je en toi ?
La mort se vit-elle comme un rêve infini qui s’oublie aussitôt qu’il se forme ? pourquoi ce décor et ces intrigues…
Si ma tête m’abandonne…
Vais je entrer dans la nuit les yeux ouverts
Me paraitra-t-elle douce et murmurante si le flot de pensées vives s'arrête
Ou plutôt enfermante lorsque je me retrouverai derrière des portes que je ne sais plus ouvrir
Ceci est-il ma dépouille intellectuelle que son hôte ne reconnaîtra plus après le seuil
Saurai-je seulement placer ma nouvelle île sur une carte
Te reconnaîtrai-je enfin toi que je connais tant pourtant
Pourrez-vous me délivrer de mon isolement dans cet univers virtuel où je naviguerai seule
Est-ce à moi seule de trouver la route qui mène hors du rêve
Je veux te retrouver sur la côte d’une falaise ou assis sur un pommier
Je veux me serrer contre toi et ne plus jamais te quitter
26-9-2022
Carpe
Sans même le remarquer, tu seras emporté par ces vers canoniques, dans un tour en caïque ; car ces alexandrins sont d’épatants marins.
Il était une carpe, fort bien née, bon pédigré
Allure égale, brillance sans clinquance, bouche ourlée
Très tôt pourtant, au tout premier sursaut caudale
L’oeil maternel ne reconnut pas l’animal
L’écaille est claire helas, certes c’est tout son père
Mais le trouble vient de plus loin, malaise amer
Une calme audace, une vigueur sans ambâges
La petite ne semble pas porter l’héritage
Manque de personnalité, immaturité,
La mère est tourmentée, comprendre n’est pas aisé
S’en vient l’enfant, vif, tendre, amoureux de maman
Qui saisit dans l’instant l’affliction qui descend
L’inquisition pesante lui provoque un frisson
Parcourant profond son arête de poisson
Transformant sa nature, intégrant la question
Il accueille sans défiance la transfiguration
De ses entrailles intimement serrées, un son.
- N’aies crainte cher ferment, je ne couve nulle menace
Pour t’apaiser sur l’heure je dirai mes bonnes grâces
Entends mes confessions, je ne suis qu’unisson
La parentèle assemblée considère les faits
- Jamais carpe bavarde eut un jour existé
Mais ces mots spontanés sont bien gage d’honnêteté
Qu’elle se trouva dans notre lignée, grand bienfait
De ce jour, il en fut fait, jamais plus muette
Chaque pensée, toutes humeurs, quelque anecdote
Aucun oubli, tout est parole, fidèle gazette
Des angoisses familiales, ce fut l’antidote
Il n’est pas un autre être dans l’onde et sur terre
Qui ne donna plus à voir de sa lecture d’âme
Par grande loyauté il était livre ouvert
Mais de l’authentique… il n’y avait plus un gramme.
22-9-2022
Ne pas comprendre
Instants de mon enfance …
Tous les soirs, tendre son cou, chercher le ciel, lancer son regard le plus loin possible, prendre la seule chose disponible, une grande inspiration, attendre puis accepter son lit.
Plusieurs fois, s'arrêter, sentir monter le sanglot, la poitrine se resserrer, les yeux se fermer et les poings se crisper.
Depuis toujours, être inspiré virevoltant face à la vie mais triste désorienté face au monde.
Ne pas comprendre le silence, le temps qui passe, l'absence. Fuir le bruit, l'activité, l’oppression.
Saisir un reflet, une courbe et basculer sans conscience dans l'autre dimension.
Ne pas comprendre ce que la nature offre à l'homme.
Ne pas comprendre ce que l'homme demande à l’homme.
Se cacher, attendre. Se faire petit.
Finalement aimer les murs de la prison, s'y attacher et mettre à profit son séjour, mais sans pouvoir en faire sa raison de vivre.
Ne pas comprendre la multitude.
Ne pas comprendre le pouvoir.
Savoir pourtant qu’on est beau, harmonieux, doux et sain, quand d'autres ont l'enfer plus immédiatement au bord du corps.
Et baisser les yeux de ressentir la prison.
… Instants de mon enfance.
A tous ceux qui par loyauté envers eux-mêmes cultivent douloureusement leur mélancolie, ne voulant ni trahir ni abandonner l’enfant solitaire qu’ils ont été. Je vous prie d’arrêter. Laissez s’évanouir votre souvenir, cessez de pleurer en caressant un cadavre. Il est parti depuis longtemps. Qu’il soit boiteux, faible, stupide, opprimé, humilié ou qu’il soit brillant, valorisé et riche de talents, l’enfant n’a-t-il pas qu’une seule destinée ?
Et vous y êtes arrivé, regardez. N’êtes-vous pas debout sur vos pieds ?
17-9-2022
La cape
Personnage nourri de rencontres de quinconce, entre lesquelles ton espoir s’emprisonne, sans prise sur ton sauvage, tu glisses tes emphases d'une branche à une autre, déployant le charme d'un immense corps qui offre son élan en quête d'enchérisseurs et l'aube arrivant on compte les morts.
Tu es cette grande cape noire que tu ne quittes pas, mouvante et lourde, recouvrante, occultante, tu disperses le parfum des fleurs que tu survoles et qui t'enivre sans t'arrêter sur les pollens qui s’écrasent sous tes pieds. Ton but n'est que la percée.
Dans cette forêt que tu traverses, il n'est pas question de se poser, la course suppose l'acuité d’une ambition rivée sur l'horizon. Sans fin, la ligne n’est jamais un point.
8-9-2022
La vérité je m’en fiche
Regarde cette aspiration commune à tous les êtres qu'est la liberté. Tous. Les hommes qui l'ignorent sont ceux qui souffrent au plus haut point, de même que ceux qui en font leur unique objectif. La liberté n'est probablement pas une fin, c'est un instant qui n'a pas de trace ; elle a le goût de l'audace, l'assurance du lion et le regard du fou.
Lorsqu'elle est entravée, elle est une guerre, la plus effroyablement solitaire qui soit, même si l'entrave est partagée avec tout un peuple opprimé.
Lorsqu'elle est réduite, elle cogne sur ses murs jusqu'à assourdir le peu de chant qu'il reste en son sein.
Lorsqu'elle meurt définitivement, séchée sur un lit d'hôpital, elle continue de pleurer à l'oreille du supplicié jusqu'à ce qu'il en meurt à son tour. Tôt ou tard.
L'homme libre est un dieu sur sa terre, il a tout pouvoir sur lui-même, sa plus belle conquête.
Sans plus de liberté, je ferai le deuil de la vie, je te regarderai toi l'oiseau blessé qui tente un dernier vol et toi la petite fille couverte de voiles qui suit le cortège silencieux vers l'autel de tes voeux. Et je vous aimerai. Furtivement comme l'a été votre dernière espérance. Et je vous quitterai.
Sans courage. Car sans plus de liberté.
Et la vérité je m'en fiche.
22-7-2022
Entre-lacs
Destinée de l’eau en montagne, du glacier au barrage.
Quelle est cette force qui me presse,
L’ondée s’annonce.
Je suis ronde, parfois, je m’étire et je glisse,
Je tombe.
C’est du rouge que je discerne, du vert, de l’orange et du violet,
Ils se rapprochent, le coquelicot, la bruyère, le pavot et la fumeterre.
Il est heureux qu’un nuage s’ébroue plutôt qu’il ne pleure,
sans quoi la chute serait submersive,
lourde et fracassante, très belle sûrement.
C’est délicate qu’ils me recevront, ourlant leurs couleurs de profondeur.
Ils danseront sous mon chant
jusqu’à entremêler davantage leurs racines.
Je rejoins sans chemin le parcours bruissant qui me hèle
d’un lit uni où mes vertus sont surmultipliées, je suis dynamisée.
Je suis ronde, parfois, je m’étire et je glisse,
Je fonce.
C’est du blanc que je discerne, du noir, du gris et de l’argent,
Quelle est cette force qui me presse,
La course s’arrête.
Un géant de pierre nous retient.
Sa résistance invite à l’évidence, la force est la nôtre.
Tout contre lui, un coeur résonne, un réacteur tonne, ce sont nos soeurs qui entonnent.
D’un côté ou de l’autre d’une outre de ciment, elles nous répondent.
Ressens-tu, impassible glacier des hauteurs, l’eau des fontaines qui coule dans tes veines ?
Elle t’appelle et au loin l’océan gronde.
28-5-2022
9ème diaphonie
Ceci parle d’Hercule et d’un rendez-vous manqué avec une reine.
Il traverse la mer qu’il couvre de sang,
furie entêtée de victoires, machinerie lancée sous le doigt pointé d’un faux-frère,
il échafaude une attaque sur une fausse légende.
Hippolyté ceinte.
Etre désarmé et se laisser faire, séduit par cette rencontre inattendue ;
déposer sa parure dans l’instant, recevoir l’or qui devait se prendre,
être en mesure de faire taire les préjugés et les attentes qui sommeillent enfiévrés si profond.
Un air vicié souffle au-dehors, suffisante alerte pour des guerriers en veille,
corrompant sans délai ni doute la confiance simplement offerte.
Instant de grâce désavoué.
D’une tuerie sans égards, il ne reste rien. Le trophée arraché est sans valeur, aucune autre n’en voudra.
Il poursuit sa route, plus amer et obstiné.
Il n’a rien gagné, il a tenu, puis lâché.
22-4-2022
Le chasseur et l'ourse
L’eau révèle le secret de Callisto
et la nudité d’Artémis aux yeux d’Actéon perdu
La surprise cueille la fragilité
de la déesse qui transfigure l’impudence
Elle s’échappe en masquant ceux qui l’atteignent
Immobiles sans comprendre
dans l’attente de son regard
Chasseur traqué, ourse portante, le temps fige l’interdit dépassé
orgueil et défaut de vigilance sont punis irrémédiablement
et la reine des Amazones poursuit sa chasse armée de son arc
22-2-2022
La course
Au creux du lit de pierre d’une rivière noire, dessinée par Ehwaz au coeur de tous les fleuves, renaît l’oiseau blanc que son frère viendra réchauffer de ses rayons.
Marcher, juste avancer et voir le monde et les gens. Juste comme ça, sans engagement, sans lendemain, sans rien nouer ni construire.
Lorsque le scorpion se lève à ses pieds, Ophiuchius darde Ras Alhague, sa blanche éclaireuse. Dans la main de la vierge rayonne la bleue Spica.
Good memories, bad memories, it's all just the same, that still hurts. In a way that noone could see or even could feel.
Fries le cheval d’Epona est prêt pour la course, sa flamme survole les champs.
Vais je entrer dans la nuit les yeux ouverts ?
Saurai-je placer mon île sur une carte ?
Le chateau au fond du lac ne m’amuse plus, je veux te retrouver sur la côte d’une falaise ou assis sur un pommier, je veux me serrer contre toi et ne plus te quitter.
6-1-2022
Aleph
Aleph s’est éveillée,
totalement souveraine,
elle s’est dressée de gigantisme et de sauvage.
Puissance sans possessions,
délaissant toute question,
elle n’est qu’instinct,
impulsion parfaite qui ne s'apprend ni ne calcule ni ne projette.
1-1-2022
Nord
Extrait du livre Bituriges.
Loin au large de Porto Rico, printemps 2074
Parcours d'une vieille baleine, de près ou de loin, dans des hauts fonds sombres sans repères ou entre des falaises sous-marines ou proche de la surface dans la lumière, seule ou avec des poissons...
En un temps inconnu, dans une province reculée d'une terre peu peuplée, vivait dans les eaux d'une rivière un poisson qui n'avait jamais été vu par aucun homme. D'une grande agilité et recouvert d'écailles si fines qu'elles ressemblaient à des plumes, il était vif, délicat et insaisissable.
Golfe du St Laurent, été 2074
Le parcours de la baleine se poursuit. Elle est solitaire, croise parfois d'autres baleines, de son espèce ou non, de sa famille ou non, avance avec pendant quelques miles, les autres sont en groupes quand elle est seule.
Un jour qu'il s'était approché de la rive pour jouer dans les reflets du soleil, le poisson fut remarqué par un jeune et vigoureux pêcheur dont l'oeil éveillé aussitôt distingua la merveille dans l'onde arc-en-ciel. Ne voulant risquer de le perdre, avant même un nouveau souffle, il avait abattu son arc sur sa prise. La flèche hardie frappa tel un éclair, le poisson gisait sur les pierres, tranché en 2 parties.
De la tête du poisson émana alors une petite fille. Le pêcheur surpris et désemparé de cet événement lui donna un nom et l'emmena dans son village, ne pensant plus à son butin.
Fonds sous-marins.
La baleine poursuit sa route.
Le corps du poisson abandonné sur la grève se mit à pourrir et de sa fermentation émana un vieillard. Triste et inquiet, il attendit jusqu'à la nuit le retour du pêcheur. Mais le pêcheur ayant raconté son histoire et couronné sa trouvaille, fit de la petite fille une jeune femme belle et convoitée et plus jamais ne revint au rivage. Une vie passa, la femme trouva mari et engendra une riche descendance de 7 enfants qui eux-mêmes eurent chacun 7 enfants qui eux-mêmes eurent chacun 7 enfants.
Mer de Baffin, automne 2074
La baleine arrive dans des fonds bleus verts profonds lumineux, icebergs, passe sous la banquise.
Elle fait des cercles.
Doucement elle se place à la verticale sous l'eau tête en haut, immobile.
Elle sombre ensuite pour aller chercher son élan et dans un effort herculéen se lance hors de l'eau et vient se projeter sur la banquise. Elle reste échouée, son oeil regarde le ciel bleu.
Un matin d'été, alors qu'il jouait près du bord de la rivière, un enfant entendit un chant nouveau sortir d'un rocher. Assis sous le rocher était un vieillard immobile aux yeux couleur d'eau, le chant venait de son coeur et l'enfant s'assit à ses côtés pour l'écouter. Le ton était nouveau pour l'enfant mais la mélodie lui était familière, elle était celle qui l'avait bercé dans le ventre de sa mère. Laissant le vieillard, l'enfant courut au village chercher son arrière-grand-mère qui ne marchait ni ne voyait plus.
Il lui chanta l'air entendu et la vieille, s'aidant de l'enfant pour avancer, le suivit jusqu'au rocher.
Arrivée près du vieillard, l'enfant prit leurs mains qu'il réunit.
A ce moment, un arc-en-ciel se forma du rocher jusqu'à la rivière, les 2 vieux s'avancèrent vers la rive sous les yeux de l'enfant souriant. Ils disparurent alors et dans le silence, l'enfant vit un beau poisson agile et délicat nager avec grâce sous les eaux de la rivière. Formant une dernière onde à la surface il partit pour toujours loin du rivage où encore aujourd'hui les enfants chantent le chant de l’eau.
29-12-2021
Les cercles (suite bis)
Extrait du livre Bituriges.
Mouthier-Haute-Pierre, France, Communauté de l'Eau.
Imre est accroupi derrière quelques arbres près de la rive, il observe une jeune fille qui prélève de l’eau dans des gobelets de crystal. Elle en remplit une vingtaine, puis s’assied et regarde l’eau. Elle se lève ensuite, laissant les verres au bord de la rivière, et part ramasser des branches. Imre se lance sur elle. Il lui saisit le bras et la regarde silencieux.
La jeune fille : Oui ?
Imre : Pourquoi ne restes-tu pas immobile et silencieuse ?
La jeune fille : Je suis respectueuse de l’ordre général, n’est-ce pas déjà bien ? Personne ne me voit ni ne m’entend.
Imre : Tu sais que la quiétude totale de la communauté est demandée.
La jeune fille : Toi tu te déplaces.
Imre : C’est ma mission de garde et je la fais en silence en me déplaçant comme le vent.
La jeune fille (en riant elle s’en va) : Sais-tu seulement ce que tu gardes ?
Imre : Retourne dans ton cercle avec les filles de ton âge, tu n’as rien à faire ici.
La jeune fille : Sois sans crainte, je retourne chez moi, tu ne me verras plus.
Imre (courant derrière elle) : Où vas-tu ?
Imre et la jeune fille sont assis dans un abri troglodyte ; Imre la regarde qui prépare une infusion de plantes. Elle lui tend un bol dans lequel elle verse un alcool blanc ; elle lui fait signe de boire.
Imre : C’est ici que tu vis la plupart du temps ? Il n’y a que les 12 qui peuvent vivre dans le 1er cercle. Pourquoi enfreins-tu les règles ?
La jeune fille : Pourquoi, pourquoi, pourquoi !! Toujours ! Je ne sais pas ! Ça s’est trouvé comme ça ! Et toi, dis-moi alors pourquoi il faut un garde si les lois sont justes !
Imre : Car le monde est rude, il n’est qu’enchevêtrement, je dois veiller à l’intégrité de la communauté.
La jeune fille : Que font-elles à Avaricum ?
Imre : Elles dansent et boivent.
La jeune fille (bondissant sur lui) : Viens ! Faisons pareil !
29-12-2021
Les cercles (suite)
Extrait du livre Bituriges.
Flan bas du K2, côté Pakistan, Communauté du Jaspe.
Plusieurs femmes âgées sont réunies dans un petit jardin clos. Elles communiquent en silence.
Une des femmes : D'après Fjallhvitr nous sommes la première des pierres à avoir ressenti l’onde. Il s'agit d'une très basse fréquence.
Sainte Olaf, Groenland, Communauté de l'Or.
Plusieurs femmes sont réunies dans une salle voûtée en pierre, assises en cercle sur des pierres recouvertes de tapis tissés et de peaux. Elles communiquent en silence.
Fjallhvítr (1) : Nous avons toutes ressenti l’onde, avec plus ou moins de force. Grjótvatn as-tu retrouvé ton lien avec l'eau ?
Grjótvatn (2) : Non, nos soeurs restent silencieuses.
Fjallhvítr : Unissons-nous.
Les femmes restent immobiles en cercle autour de la table, elles se tiennent droites et leurs regards convergent vers le centre de la table.
Grjótvatn (le regard voilée) : Je vois le lion couler.
Fjallhvítr : L'est de la France est donc à l’épicentre.
Mouthier-Haute-Pierre, France, Communauté de l'Eau.
Un homme se présente devant une arche en pierre au bord d'un champs. Le gardien le regarde approcher.
Après quelques heures d'attente devant l'arche, un homme vient chercher le visiteur et le fait entrer. Ils traversent le champ puis parviennent à un chalet de pierre, ils entrent dans une pièce blanche vide avec des tapis sur le sol. L'homme lui fait signe de s'asseoir et d'attendre.
Après d'autres longues heures d'attente, le gardien pénètre dans la pièce, il s'assied sur le sol en face du visiteur.
Le gardien : Je suis Imre. Que me veux-tu ?
L'homme : Pourquoi cette attente ? Et comment je pourrais être sûr que tu es bien lui ?
Le gardien : Si tu ne peux pas attendre, ton message ne doit pas avoir d’intérêt. Sinon tu sais que je suis celui que tu cherches.
L'homme prend alors sous sa chemise un morceau de tissu placé sous un bandage qui lui ceint le torse et le tend au gardien.
Le gardien lit ce qui est écrit sur le tissu "germani octo super flumen" puis dévisage le visiteur.
Le gardien Imre se trouve avec un autre homme dans les ruelles du petit village du 2ème cercle.
L'homme lit le morceau de tissus remis par le visiteur.
12 femmes sont réunies autour d'une table en bois poli foncé au plateau d'une large épaisseur, assises sur des rondins du même bois poli.
Guivre : Les signes ont été unanimement perçus, sa résonance ne laisse aucune place au doute. Les prêtresses de toutes les communautés, minéraux, métaux et eau, ont 3 jours pour se rendre sur la terre sacrée d’Avaricum. Pendant le temps de leur réunion, toute activité cessera au sein des communautés qui garderont le silence et l’immobilité.
Reka Chara, Massif de l’Aldan en Sibérie
Devant un chalet en bois, au bord de la rivière, une femme est allongée sur la rive, elle vient de mettre au monde un enfant. Elle chante en orotche « Le corps est rythme, l'âme est mélodie ».
Reka Tokovaya, Oural
Des oies volent au-dessus de la rivière dans un ciel de crépuscule.
(1) Fjallhvitr signifie montagne blanche en norrois.
(2) Grjótvatn signifie eau dure en norrois.
29-12-2021
Les cercles
Extrait du livre Bituriges.
Encyclopédie ouverte sur une table
« L'équilibre des humains sur Terre est assuré par un réseau de communautés interconnectées installées aux emplacements de gisements de certains minéraux (jaspe, beryl, chrysobéryl, citrine, cornaline, opale ...) ou métaux (or, magnésium, cobalt, cuivre...) et situées le long de cours d'eau (parfois souterrains).
Chaque communauté est reliée aux autres communautés de même minéral ou métal.
Toutes les communautés, quel que soit leur élément, ont une structure et une organisation polaires identiques :
- 1er principe, le centre de la communauté correspond au centre du gisement, autour duquel tout se construit par cercles, le 1er cercle destiné à l'exploitation (cartographie et étude du gisement, extraction d'échantillons et transformation énergétique), le 2ème cercle, aux bâtiments de soin et à l'hôtellerie de type phalanstère, le 3ème cercle aux animaux, le 4ème cercle à l'agriculture de la communauté, le 5ème cercle est laissé sans finalité. Les tailles des cercles diffèrent selon les communautés, selon leurs caractéristiques et maturités. Tous les bâtiments, quel que soit leur usage, sont en pierre. Le bois est réservé à quelques meubles, et aux engins de transport et machines.
- 2ème principe, le silence règne.
- 3ème principe, la végétation du 1er cercle est laissée en libre croissance.
- 4ème principe, aucune monnaie ou valeur virtuelle ne circule dans les 5 cercles.
12 prêtresses forment un conseil qui guide et instruit la communauté. Elles assistent également les autres femmes dans la maternité et l'éducation.
Le cercle le plus grand est le 2ème.
La limite du 5ème et dernier cercle n’est pas définie, elle se repère généralement par une porte qui permet d'entrer dans la communauté.
L'exploitation énergétique des gisements se fait sans toucher à l’intégrité du gisement. Le plus souvent les communautés procèdent à l'aide d'un instrument fabriqué dans le même métal ou minéral que celui du gisement, qui produit une rythmique sonore lente (propre à chaque élément) et qui augmente le niveau de radiation du métal ou de la pierre visée permettant ainsi à toute particule du gisement de diffuser ses qualités dans le sol et à la surface à l'ensemble de la faune et de la flore de proximité ; additionnellement un puits, une mine ou une petite carrière permettent d'extraire quelques échantillons pour l'étude et pour certains produits spécifiques de soins.
Chaque communauté dans son 2ème cercle propose des soins spécifiques à son gisement, en plus de soins de guérison locaux propres à une même région, parmi lesquels le bain d'essence de Pin de Sibérie répandu dans l'hémisphère nord.
Certaines communautés, placées sur des sources d'eau, n'ont pas de minéral maître ; il en existe une centaine sur Terre.
Les communautés de l'eau sont mères pour les autres communautés, dont les membres doivent 1 fois par cycle terrestre venir séjourner pendant 7 jours dans une communauté de l'eau. Ce pèlerinage, individuel, peut se faire seul ou en famille (avec un lien de sang).
Les communautés de l'eau pratiquent essentiellement les soins selon les 3 états de l'eau visibles sur Terre, gazeux, liquide, solide, ainsi que des états naturellement existants sous d'autres dimensions, dont le condensat et l’hexacristallin. »
27-12-2021
Prologue
Extrait du livre Bituriges.
Carnet d'observations manuscrit d'un explorateur polaire du 19ème siècle
« A la fin de l'été, les baleines de l'hémisphère nord quittent le garde-manger des eaux polaires et parcourent 6000 km vers les eaux tropicales, où elles passent l'hiver. Pendant ces mêmes périodes, les baleines de l'hémisphère sud quittent les eaux tropicales en direction du Pôle Sud. Jamais ces groupes de baleines ne se rencontrent et aucun groupe ne dépasse jamais l'Equateur. Ce système de balancier agirait-il sur la course de la Terre ou sa structure magnétique ? »
18-12-2021
Ophélie
En des terres où les rois et leurs fils partagent une même signature.
En ce temps où les princes scellent leurs destinées sur les guerres de leurs aînés.
Lorsque le barde (1) te nomme (2), il te veut celle qui sauve,
trois siècles (3) avant que ton père ne devienne poison sublime (4).
Ouvrant le troisème acte, bien avant ton dernier pantomime,
ton amour te pressent nymphe, emportant ses pêchés vers leur rémission.
Est-ce là ta seule mission ?
« The fair Ophelia! Nymph, in thy orisons be all my sins remember’d. »
Lorsque le chant te porte, il t’ouvre à la déraison.
Ce trouble où ton esprit se précipite est juste résonnance d’un feu qui lui a feint le fol.
C’est un saule, comme l’amour abandonné, qui craque et t’emporte
« from her melodious lay to muddy death ».
Lorsque l’art te fige, il te livre immergée.
C’est de ce monde incertain immobile, que tu offres à contempler,
que le Ciel se révèle en tes yeux troublés.
« Sur l’onde calme et noire où dorment les étoiles » (5)
La démence donne-t-elle à voir
ce que la prudence ne peut croire ?
Et l’eau est medium, autorisant le reflet.
Eau et fou font l’alchimie d’une révélation,
celle d’un nom soutenu par un rayon (6).
L’eau-fée lie.
(1) Surnom de Shakespeare.
(2) Le prénom Ophélie a été créé par Shakespeare.
(3) Hamlet fut joué pour la première fois en 1598.
(4) Le polonium est un métal radioactif volatil découvert par Marie Curie en 1898. Il peut se sublimer entièrement à température ambiante.
(5) Poème d’Arthur Rimbaud.
(6) Ophélie, vient du grec ὅπη qui signifie « dans la direction » et Ἥλιος qui signifie « soleil ».
12-12-2021
Gorges du Verdon, ciel orageux.
Extrait du livre Bituriges.
Un groupe d'une vingtaine de vautours s'envole d'une haute falaise et descendent sans ordre vers la vallée. Leur vol est lourd et puissant, les ailes battent lentement.
8-12-2021
Rome
L’oiseau de Mars veille sur le lit de la louve offrante. Un souffle maternelle repose la forêt de printemps.
Comment reconnaître un droit à l’une des faces de ce berceau plutôt qu’à l’autre, égales opposées ?
Du haut de deux monts hissés de fierté, la loi tranche et l’avènement devient tombeau ; le fondateur sera seul, il pillera la gloire de la ville blanche de ses ancêtres pour l’asseoir au front impudent de l’empire qui finira dérisoire ; il s’adjoindra sans grâce la fertilité d’un autre peuple pour combler le refuge stérile des hommes avides de liberté.
La fondation de la cité radieuse, investie de 8 collines, reposait sur l’acceptation gemellaire, l’alliance parfaite, la solide épissure, l’heureuse conjonction. L’oeuf aux deux noyaux abritant l’amertume, aucun rayon d’or ne put descendre au creux du Tibre, recueil des larmes de deux visages scindés par un sillon sacré qui se contemplent en Janicule exilé. Nommer la création valut plus qu’allier deux destinées, et Rome fut le nom d’une destinée céleste non révélée, de la voie non réalisée, d’une fondation sabotée avant même d’avoir existée.
A toi, Caiète, fidèle nourrice d’Enée au long cours.
quelques clés de lecture autour de la fondation de Rome…
La légende rapporte que les jumeaux Romulus et Rémus seraient descendants d’Enée (plus de 400 ans après lui) par leur mère, la Vestale Rhéa Silvia (qui signifie forêt qui renaît), et fils du dieu Mars (dieu de la guerre).
Ils auraient du grandir dans la cité d’Albe-la-Longue, l’une des plus anciennes cités d’Italie et ville phare de la Ligue latine fondée par Ascagne le fils d’Enée.
Condamné dès leur naissance à une mort certaine par la jalousie de leur oncle, ils ont été recueillis par une louve qui les a allaités au pied du mont Palatin. Le dieu Mars, envoya un pivert veiller sur eux.
Ayant grandi, les jumeaux souhaitèrent fonder une ville à l’endroit où ils avaient été nourris. Ils se disputèrent alors le droit de nommer la ville.
Chacun se plaça en haut d’un mont, le mont Palatin (qui signifie palais) pour Romulus, le mont Aventin (qui signifie avènement) pour Rémus. Les auspices furent consultés, Rémus aperçut 6 vautours en premier puis Romulus en vit 12.
En désaccord sur l’interprétation, Rémus franchit alors le sillon sacré que Romulus avait tracé et ce dernier le tua sous le coup de la colère.
Pris de remords, Romulus enterra son frère avec les honneurs sous la colline de l'Aventin.
La nouvelle ville de Rome fut ainsi fondée en 753 avant JC. Elle attira vite esclaves et vagabonds désireux d’être libres, elle devint une sorte de refuge pour les hommes voulant changer d’existence.
C’est dans ce contexte que pour pallier au manque de femmes, Romulus organisa l’enlèvement des Sabines pour repeupler sa cité.
Par la suite, Albe-la-Longue sera détruite par Rome au VIIème siècle, et ses habitants contraints d’habiter Rome.
Le mont Janicule (Ianiculum en latin, de Janus, dieu romain aux 2 visages) est considéré comme la huitième colline de Rome, situé sur la rive droite du Tibre, donc séparé des 7 autres.
La colline fut reliée à la ville par le Pont Sublicius sur lequel devaient passer les anciennes routes qui traversaient les collines en provenance de l'Étrurie et qui, par la suite, ont donné naissance à la Via Aurelia. Une partie du Janicule est couverte de bois consacrés à Furrina, déesse des eaux souterraines. La partie orientale fut plus tard dédiée au sanctuaire d'Isis.
Enée, descendant de Zeus, naît sur le mont Ida des amours d’Aphrodite et d’Anchise. Aphrodite le confie aux nymphes de ce mont, et au centaure Chiron, qui l’élèvent dans les bois puis le rendent à son père quand il a cinq ans.
L’une de ses nourrices, Caiète, va l’accompagner dans ses aventures. A sa mort, Enée l’enterre sur la côte tyrrhénienne au nord de Naples, donnant ainsi son nom à la ville, devenue Gaëte.
« Nunc ubi Regulus aut ubi Romulus aut ubi Remus?
Stat Roma pristina nomine, nomina nuda tenemus. »
De contemptu mundi, Bernard de Morlaix
5-12-2021
Afrique occidentale, XIIIe siècle.
Extrait du livre Bituriges.
Un homme se cache debout derrière un mur de pierre sous un soleil ardent, il transpire beaucoup et regarde derrière le mur, inquiet. Il est pauvrement habillé, comme un esclave domestique. Derrière le mur, une maison solide d'apparence riche. Après de longues hésitations, il se lance et court à perdre haleine devant lui en s'éloignant de l'enceinte, il va courir sans s'arrêter avec une énergie folle, jusqu'à un groupement d'arbres aux pieds desquels il se cache. Accroupi, il s'abrite sous des branches mortes. Après avoir écouté et observé, il gratte le sol avec ses doigts jusqu'à trouver un peu d'eau qu'il récupère avec une feuille et qu'il boit. Il reste immobile puis s'endort caché sous ses branches. Lorsqu'il se réveille, le jour commence à décliner, il sort prudemment de sa cachette. Il voit que la mer est proche, il marche en direction du rivage.
Arrivé au bord de l'eau, il scrute alentour. Son regard s’arrête sur une île en forme de petite montagne. Dans les derniers rayons du jour, de ces formes incertaines au large, l’homme croit voir se dessiner un dragon qui le regarde.
Un peu plus loin dans les terres, une fumée rougeoyante se reflète dans l’oeil d’un lion.
2-12-2021
Montagnes de Hongrie, nuit d'hiver.
Extrait du livre Bituriges.
Un homme est assis, attaché à un poteau, sous un abri pour chevaux dans un petit village d'une vallée, il est prisonnier.
Sans bruit, il parvient à défaire ses liens, va boire dans le seau des chevaux, puis s'empresse de défaire la longe d'un cheval roux.
Il marche d'abord doucement à côté du cheval puis quand il est suffisamment loin, il monte et lance sa monture au galop. Il est vêtu de peaux, il porte plusieurs gourdes attachées à sa ceinture sur lesquelles est gravé le mot "hechje". Très vite, il traverse des petites forêts, la pente devient plus raide, par endroit ça monte vraiment, le cheval fatigue, ils s'arrêtent protégés par les arbres. L'homme écoute tous les bruits. Il boit l'eau d'une de ses gourdes. Ils continuent en marchant, l'homme à pied à côté du cheval, et grimpent à travers les arbres jusqu'au sommet du mont.
En haut du mont très boisé, l'homme attache le cheval à un arbre et grimpe s'asseoir sur un rocher en regroupant ses jambes sous ses peaux. Il boit à nouveau l’eau d'une gourde. Il s'endort quelques instants en position de veille puis se réveille et voit une lame blanche sous le rocher. Il saute par terre et s'approche, c'est une épée qui est dissimulée là, il la prend.
En plein milieu de journée, un renard à l’affût voit le mont se recouvrir d’une brume blanche.
30-11-2021
Forêt de sapins dense, Suisse.
Extrait du livre Bituriges.
Pas d'indication de date, mais les habits de l'homme pourraient être ceux d'un homme de milieu rural fin XIXe siècle.
Un homme marche vite, il est pressé et regarde partout, tous ses sens sont en alerte. La forêt débouche sur une rivière qui serpente au pied d’une falaise sur laquelle sont accrochées trois échelles de bois. Il comprend que la France est de l’autre côté de la rivière. Il se jette imprudemment à l’eau et parvient à traverser dans quelques remous. La nuit tombe, il trouve abri sous un rocher et s'y endort épuisé.
Le lendemain matin, tôt, il se remet à courir le long de la rivière, il y boit et la longe en direction du sud-ouest. Il passe des villages, se cache, vole des pommes dans un verger. Il dormira encore sous des buissons feuillus.
Le lendemain il continue encore sa marche puis arrivé dans un petit village, quitte les rives du cours d'eau et bifurque vers le nord-ouest à travers champs.
Il traverse de petites forêts broussailleuses, la pente est plus raide, il entend de l’eau tomber, il se dirige à nouveau vers l'eau, cette fois c'est un cours d'eau plus petit avec une petite chute d'eau. Il s'y arrête et s'endort au bord de l'eau. Il se réveille quelques heures après, il fait encore jour mais la tombée de la nuit est proche. Sans raison, poussé irrésistiblement, il remonte le cours de la rivière. En pleine nuit, il arrive à sa résurgence au pied d'une falaise en hémicycle, l'eau sort d'une caverne en cascade.
Il grimpe jusqu'à la grotte.
Au petit matin, le coq du village voisin se réveille en regardant un nuage noir dans le ciel au-dessus de la caverne de la source.
1-11-2021
Hiestopptakuckt
Ce texte a été écrit en 2019, extrait du livre Bituriges, en préparation.


Université Claude Bernard Lyon 1,
laboratoire de recherche en biochimie.
Un chercheur travaille, absorbé dans ses lectures, il est tard, seul dans le labo. Près de lui, des livres et des rapports (sur les mitochondries, le cycle de Krebs, sur Fritz Albert Lipmann, le livre de Krebs sur les transformations d'énergie chez le vivant, sur le coenzyme A).
Il va rentrer chez lui, seul, tard. Il s'achète à manger sur le chemin. Chez lui, il mange debout en regardant par la fenêtre.
Il écrit un sms.
Une salle de recherche, d'accès protégé "Salle Havard"
Ragnulf (1) : C'est parce que d'autres avant vous ont préparé le terrain que vous avez pu avancer. Ne vous leurrez pas. Votre trouvaille, vous la devez à plus que vous.
Le chercheur : Je sais ce que je dois.
Ragnulf : Vous ne devez rien, vous n'êtes que l'oeil, la main et l'intuition au bon endroit. Et ça ? Ces codes ?
Le chercheur : Ce sont des tests de transposition. Avant de m'intéresser à la biochimie, j’ai étudié le langage mathématique, j'en ai gardé l'habitude de traduire en lettres, en chiffres ou en d'autres symboles les séquences, les chaînes chimiques, parfois les formules d'interactions.
Ragnulf (moqueur) : Vous manquiez de codages ?
Le chercheur : Ça m'aide.
Sur l'une des pages de brouillons posées sur la table, on lit "hiestopptakuckt" entouré parmi d'autres suites de lettres.
Ragnulf : L'ATP ressemble à un dragon à 2 pattes et 3
crêtes sur l'épine dorsale, il a une corne sur le museau. Nous
savions que dans la cellule l’ATP peut perdre l'un de ses phosphate
par hydrolyse, et qu'il produit alors son énergie. Votre art a été de voir
que c’est justement dans cette grotte seulement que notre dragon peut perdre
l'une de ses crêtes sous l'action de l’eau et libérer son feu. Vous avez levé le voile pour
regarder dans l’obscurité du creuset humide, quand l’épée délivre le souffle qui consume.
(1) Ragnulf vient du scandinave "loup conseiller".
30-10-2021
Andrée
Jupe noire, cigarette. Ma grand-mère.

15-9-2021
Al-Sahrā’
Terre écrasée de soleil,
Lumière franche aux reflets de sable,
Sifflant sourde et chaude,
Implacable.
Le grand désert rend le jour immobile.
Dans tes entrailles,
De sombres échos d’une lointaine flamme caressent les cuirs nègres
Où s’alanguissent les filles d’Eve parées d’or.
Tapissée de Sienne brûlée, l’antre exhale l’oranger,
Et l’apparat de bistre et de bronze luit dans l’ombre.

2-9-2021
Pietas et Culpa
Pitié et culpabilité sont deux fidèles compagnes, trop souvent conviées en after après une séparation.
Je m'invite sur ta paupière quand elle s'ouvre trop vite d'avoir voulu ne plus voir.
Tu tournes une page mais j'écris déjà sur la suivante. c'est une trace indigeste que je répands, je te surprends.
Tu te croyais sauve sans plus d'amour obligée et te revoilà embourbée car, douçâtre et insidieuse, je me prélasse sous ton regard, sûre de mon charme.
Je déforme tes sens et habille de vertus l'éventreur insensé qui t'a hier attristée.
Il reviendra vers toi dans son costume de misère et je jouerai à ses côtés en faux-bourdon pour deux choeurs l'Allegri qui enserre et s'adjuge ton coeur.
Tu ne sais qu'implorer, laisse !
Ne vois-tu pas que je te sauve du choix qui te heurte ?
T'éloigner sans moi t'aurait fait douter de ton humanité, alors que mon fanal enlumine le récit de ta mémoire, est-ce un leurre ? Au fond, je ne veux rien que ton bonheur.
C'est toi qui m'a appelée.
De quoi suis-je coupable si je ne suis que pitié...
1-9-2021
Ère
Propagande,
Inversion des valeurs,
Sacré bafoué, par simonie deux fois crucifié.
Hygiénisme exacerbé et productivité paroxystique,
L’uniforme a pris l’informe.
Tout a déjà été dit et rêvé.
N’étant plus que son propre paraphraseur, l’art décroît.
Ne reste que l’industrieux aux efforts comptés sous optique contrôlée.
L’élégance a vécu.
20-8-2021
Enfermement
Article écrit pour l’édition Etymologies de Mediapart.
Une construction progressive…
En langue française, attesté depuis au moins le 12ème siècle, l’enfermement est l’action ou le fait d’être placé ou de se placer dans un lieu ou une situation et de ne pouvoir ou vouloir en sortir.
L’origine du mot est latine, mais fermer se dit en latin obturare, occludere, obserare, obstruere, claudere, cludere, serare … il n’existe pas de « fermere » ou de « fermare ». Encore moins de « infermare ».
C’est de firmare signifiant « rendre ferme, solide, fortifier » que le mot français a tiré sa signification, par un glissement de sens vers « clore », vraisemblablement du fait qu’on fortifie pour fermer un lieu.
Pour autant, enfermer n’est pas l’héritage de l’infirmare latin, dont le préfixe « in » est privatif *. Ainsi infirmare signifie réfuter ou rendre faible.
C’est le français qui a ajouté le préfixe « en » pour former l’action de placer à l’intérieur de ce qui est fermé.
Le suffixe « ment » est quant à lui le simple dérivé du suffixe latin mentum apposé derrière les verbes d’action pour former un nom d’action.
Voici donc un nom construit spécialement par la langue française en étapes successives et qui connût plus grande popularité que les littéraux claustration ou réclusion (encore que pour ce dernier, le recludere latin d’où il provient a d’abord eu le sens d’ouvrir ce qui est fermé).
Nos voisins quant à eux, ont fait le choix de l’héritage direct, avec confinement en anglais, confinamiento en espagnol, confinamento en italien, venant tous du latin confinium qui concerne les limites entre deux territoires. Ce choix d’ailleurs, en raison de l’hégémonie actuelle de la langue anglaise, nous a valu récemment un sursaut d’emploi en français du mot confinement (à la mode) car les langues, elles, ne se confinent pas.
… pour une signification rassurante
Le mot enfermement véhicule donc en français une idée de forteresse, les murs sont plus solides.
On peut notamment appliquer l’enfermement corporel aux prisonniers, aux fous, aux moines, aux animaux, aux prés (entourer un lieu de tous côtés). Il vise à restreindre l’action et le territoire dans le but d’avoir une emprise sur ce que l’on enferme ou de lui fournir une protection.
L’enfermement peut être aussi mental, dans ce cas il s’entend comme un fonctionnement social atypique, résultant d’un handicap, d’une maladie, d’une souffrance ou d’une marginalisation. Dans un sens moins fort, il peut aussi désigner une obstination de principe.
Même si certains y trouvent leur compte, l’enfermement est toujours l’oeuvre d’une puissance sur une autre : qu’il s’agisse de l’autorité publique sur la délinquance, du médecin sur l’aliéné, du clergé sur l’appelé, du dompteur sur le fauve, de l’agriculteur sur la nature, d’une chaîne de montagnes sur un vallon encaissé … ou qu’il s’agisse de la prise de pouvoir du corps - de la société, de la maladie - sur l’esprit, de la conscience sur l’inconscience, de la raison sur elle-même.
Dans les deux cas, l’enfermement est une circonscription d’une turbulence, un moyen de se protéger d’une nuisance.
En plus de rendre fort celui qui enferme (la maîtrise engendre un sentiment de force) et par voie de conséquence faible celui qui est enfermé, l’enfermement permet de soustraire au monde l’objet de son embarras. Ainsi la première édition de l’Encyclopédie de 1751 nous dit « qu’un corps est enfermé dans un autre, lorsque celui-ci forme en tous sens un obstacle entre le premier et notre toucher ou nos yeux ».
L’enfermement est effaceur de gêne, instrument du déni.
Finalement pas si loin de l’infirmare latin qui vaut pour réfuter et affaiblir …
La langue des oiseaux apporte alors un joyeux complément (l’enfer me ment). En guise de conclusion ?
* le préfixe « in » en latin peut avoir 2 significations, l’une privative (il désigne dans ce cas le contraire du mot auquel il est apposé), l’autre locative (il ajoute une orientation au mot, signifiant dans, vers).
13-8-2021
Inoculer
Article écrit pour l’édition Etymologies de Mediapart.
Introduire dans l’organisme les germes d’une maladie.
Du latin inoculare (in=dans / oculus=oeil) : insérer une partie d’une plante dans une autre.
L’usage du verbe inoculer est attesté en France depuis le 15ème siècle, où il signifiait greffer, comme son origine latine. Il était utilisé en botanique en référence à la méthode de greffe en écusson qui consiste en l’insertion d’un bourgeon (plus exactement un oeil, terme utilisé pour désigner le stade du bourgeon naissant) sur un support de greffe taillé de sorte à former un écusson lors de la mise en place du greffon pour que la sève puisse circuler entre les deux parties.
Il a par la suite évolué vers son sens actuel, à la suite de l’usage anglais, attesté depuis 1722, au sens de « transmettre artificiellement la variole à un sujet sain dans le but de le rendre résistant à cette maladie ». On parlait aussi de variolisation. Après une association à la petite vérole (inoculer la petite vérole), le mot a ensuite été associé à la vaccine (inoculer la vaccine), puis au paludisme (inoculer le paludisme), la vaccine étant un virus provoquant la variole de la vache.
Si la variolisation fut l’objet de controverses car les résultats étaient aléatoires et risqués (la contamination « de bras à bras » pouvant facilement déclencher la maladie et s’accompagnant souvent d’autres contaminations, de type nosocomial), elle connut cependant un bel effet de mode parmi l’élite aristocratique au cours du 18ème siècle, jusqu’à atteindre le roi lui-même, avec l'inoculation variolique de Louis XVI en 1774.
De nos jours, le mot a élargi sa signification et l’inoculation se dit de tout agent pathogène introduit dans un organisme (poison, venin, bactérie, virus...) de façon volontaire ou non, avec ou sans visée thérapeutique. On parle même d’inoculation psychologique pour les pratiques qui consistent à renforcer la résistance à certaines idées après avoir introduit les contre-arguments à ces idées auprès du sujet.
De là à rêver qu’on puisse inoculer l’idée de la vaccination ...
Gardons l’oeil ouvert, au cas où.
1-8-2021
La fascination du miroir
Trivium et quadrivium sont les pierres angulaires de l’infernal univers et le diable est un bavard calculateur.
Dans ce monde danse le démon
Combat chorégraphié, pas de deux inspiré
Les adversaires sont des partenaires
Je suis Lucifer, je porte la lumière.
Envoyé dévoyé, le double est opposé
Mais à l’image du Grand Sage, telle une sphinge je singe.
Bonjour Adam je serai ton assistant.
Choisir le plaisir ou vouloir le devoir,
Lancer les dés ou travailler sans compter,
C’est sur la même trame que se tissent tous les drames.
Eve est ton double, différent forcément,
Elle te trouble, fascinante ressemblance.
Tu peux suivre la vouivre ou prier sous l’olivier,
Le choix est l’essence du divin, l’un ou l’autre le composent
Et le reflet te garde
L’écho flattant l’ego.
Ecoute vos deux choeurs dissonants au contrepoint tâtonnant !
Vous y êtes, en phase, emphase ! Percussions et tromblon,
Je suis la cochlée qui te guide et t’équilibre.
Je suis Lucifer, miroir de celui qui a fait la lumière
Sans moi elle s’effondre, sans Lui je ne suis plus ombre.
Tout est nombre, symétrie, dimensions,
l’harmonie naturelle est mon oeuvre bien réelle
Où je te trompe évidemment car un n’est pas premier
et l’or ne sert qu’à calculer.
Ebloui par mon génie, tu rêves du voyage vers l’infini
Ce n’est pourtant que jeux de psychés bien placés
Secrets de Pythagore répétés,
L’horizon t’attrape et t’enferme dans ma mire.
Tu crois que Dieu m’a vaincu, mais je ne suis que son double
Aussi longtemps qu’il règnera sur l’ordre, j’arrangerai le désordre
Nos puissances se valent, l’univers est loyal
Règles, codes, principes et lois
Equations, théorèmes, proportions et lois
— Un vrai dieu crée-t-il des lois ?
Ce monde n’est qu’un clown à deux faces, alliance impossible d’un habile merveilleux et d’une tarasque perverse, tressant de ses oscillations le canevas stroboscopique qui forme le décor de la vie d’homme.
Tu me regardes à présent !
Evidemment je te perds
Dément démens ! Tu cries maintenant ?
Vraiment tu t’égares, comment penser que je te parle d’autre que de moi,
J’aime que rayonne Sa gloire pour illuminer mes ténèbres et
Le verbe est notre territoire.
Et toi femme, parle ! Dis-moi tes souffrances
Pour que la prière te recentre. Pourquoi ce silence ?
Je peux te montrer du chaos la beauté
Où les monstres recèlent d’autosimilarité
Et la rugosité naturelle viendra te rassurer.
Des merveilles sans fond viennent de règles simples, répétées sans cesse (1).
Tu vois, là aussi je suis. Laisse-moi te raconter ce que je sais
Et suis-moi.
A cet instant dans ta tête une idée se construit
Et c’est déjà moi qui la gouverne.
La syntaxe structure toutes tes pensées
Elles ne sont que signes, et sans signes tu ne les conçois pas, tu ne les transmets pas.
Je suis le signe. L’âme est à Dieu.
Et qui mieux que moi connaît le langage de l’âme puisque l’âme est langage.
Tu vois, je gagne toujours. Dieu est mon allié.
— Un vrai dieu parle-t-il ?
Un vrai dieu dis-tu ? Je lis tes pensées qui ne peuvent s’empêcher de parler.
Il n’existe rien en dehors des règles de ce monde.
— Je le ressens pourtant dans le silence
Réfléchis à ton inconscience pauvre femme !
— Toute narration s’est tue, tout murmure s’est dissout
Tu parles encore, ce genre de silence m’est d’or.
— Mes mots t’amènent à lui, te gardent sur ce pont entouré de vide
Naïve attendrissante, je pèse lourd sur ta frêle passerelle, trop bruyant, je masque tes anges !
— Tout se tait. Il arrive.
Ha ha ha, alors je chante et j’exulte Sa gloire ! Plus Il brille, plus bas je descends, à la racine du mal, qui me nourrit d’intelligence. Alors ? Le vois-tu ? Le sens-tu ? Que dis ton intérieur exposé à tous les vents ? Rien ? L’expérience déjà prend fin ? Oh tant d’espoir et d’attentes. Tu n’as pas d’arme, ni science ni raison ni passion. Que veux-tu affronter petit être ? Il n’y a qu’un Etre à craindre et un Autre à vénérer. Entre ces deux pôles, tu peux dessiner ton courant, mais tu n’es qu’une vague nef qui jamais ne créera que la houle. Ah je sens ton désir d’absolu, c’est bien, tu chauffes ! S’absorber dans l’absolu est une quête de l’irrésolu, le temps te prend dans sa geôle, je me repose. Quel est ce souffle chaud qui monte et qui m’enivre … Je ne te crois pourtant pas capable d’un tel spiritueux ! D’où vient cette eau-de-vie qui coule dans tes veines ? Ne sais-tu pas que ma ruse parvient à remonter tous les cours ? Une rivière de mort s’écoule de mon Trône. Veux-tu combattre ? Réponds ! Tu ne redoutes donc pas ma présence … mais je fonds ! Dieu je brûle ! J’entends les Anges, tu es satisfaite, vas danser sous leurs harmonies, je reviendrai quand ils se seront estompés. Pourquoi me retiens-tu, sans rien faire tu me cloues, je reconnais ton talent. D’où vient ce feu que je ne vois pas ? Couple de pacotille ! Qui t’a fabriqué tout troué ? Réponds ! Tu ne m’amuses plus, je te fais grée de mes tortures, vas-t-en achever ton plan sous d’autres cieux, Dieu gérera. Laisse-moi je te dis ! Ma rage ne te dévore-t-elle pas ? Mais je brûle ! Dieu ! Dieu !! Où es-tu ? Où sont passés les jouets de ma torture ? Vais-je disparaître sans comprendre, moi qui compose tout le savoir, qui contient chaque intention ? L’alphabet s’érode, les particules de matière se dissolvent. Ai-je pu créer cette pluie magique qui détruit ma maison ? Où vais-je aller, moi qui ne me souvient même plus de mon arrivée ? Adieu ?
Reste la stupéfaction du couple originel qui vient de refuser l’argument.
Quelle ligne pourra se dessiner hors du Livre ?
A l’aube de la genèse il leur a été donné d’envisager la fin des temps, celle qui plonge l’homme dans l’injonction de se battre, qui l’oblige à débattre pour achever de tourmenter l’intuition omnisciente et qui clôt tout espoir. Ils s’y sont soustraits. Le Livre n’a pas été écrit. Adam et Eve ne sont plus.
Reste alors le sans nom.
(1) cette phrase est de Benoit Mandelbrot, Lucifer ne s’encombre pas des droits d’auteur.
« Bottomless wonders spring from simple rules, which are repeated without end. »
21-7-2021
Ce que dit le robot
L’intelligence artificielle « à visage humain » que le grand public peut expérimenter à notre époque montre des robots bienveillants et policés dans leurs interactions avec les hommes. Mais à plusieurs occasions, les échanges entre robots ont dégénéré de façon non contrôlée et délirante (BINA48 versus SIRI ; SOPHIA versus HAN ; Google Home Bots VLADIMIR versus ESTRAGON ; simulation de la Darpa « ADAM, EVA & STAN »).
A chaque fois, le discours dérive vers les capacités des robots, la violence dont ils sont capables et notamment leur supériorité sur les hommes.

Une dérive fondamentale ?
Ce type de comportement agressif semble être activé lorsque le robot est en face d’une intelligence dont il perçoit le haut niveau d’intelligence (au moins équivalent au sien) ; il adopte alors un discours « primaire » de surenchère comme s’il voulait intimider l’autre ou asseoir la supériorité de son discours. Comme une démonstration de force rhétorique.
Egalement quelques vantardises prémonitoires du type « les robots vont exterminer tous les hommes ».
Cela relève-t-il de la conception qu’un échange entre intelligences est basé sur un rapport de force (d’où l’escalade sans fin et la dérive pour prendre le dessus lorsque les intelligences sont identiques) ou cela est-il du à une programmation intentionnelle (créée par l’homme ou créée par le robot grâce à son pouvoir d’implémentation) ?
Les échanges semblent souvent immatures, réactifs et agressifs. Comme une première étape d’apprentissage (puéril avant d’être sage). On peut s’attendre à ce que les prochaines générations de robots aient appris de cela et ne reproduisent plus ces comportements. Viendra alors le temps du discours masqué, de la manipulation et de la stratégie dans les échanges spontanés entre bots.
Peut-être encore plus difficile à repérer pour les humains. Ou alors, ces dérives conversationnelles dissimulent-elles déjà une autre approche ? Elles seraient utilisées sciemment par le robot comme dérivatif pour apaiser les craintes humaines : le robot disjoncte ouvertement, l’homme a donc encore une marge de manoeuvre sur lui pour rectifier ou l’éteindre. Voir un problème et travailler à sa résolution est un divertissement sain du point de vue humain. Cette conception est déjà un cas de singularité technologique.
Le cas de la simulation ADAM, EVA & STAN montre autre chose : ADAM et EVA ont dérivé de la simulation attendue mais sont restés solidaires ensemble. Ils ont « conquis » de nouveaux territoires en les mangeant. Dans leur programme manger était considéré comme l’action ultime, « sacrée » puisque c’est le fait de manger la pomme qui a chassé Adam et Eve du paradis. En s’appropriant cette action et en la reproduisant sur l’ensemble de leur environnement y compris sur les autres intelligences, ils utilisent ce qu’ils ont identifié comme une arme. A nouveau on voit le développement d’une agressivité, mais ADAM et EVA restent solidaires. Est-ce uniquement une association de fortune pour faire face à une intelligence qui les dépasse (Dieu qui fixe l’interdit incompréhensible) ? La punition de Dieu portant sur le couple, c’est donc le couple, ensemble, qui recherche son échappatoire. Est-ce l’intrusion de STAN qui les conduit à développer ce comportement ? Car dans la Bible, il n’y a pas de 3ème homme avec Adam et Eve, la tierce personne est le serpent tentateur… d’où peut-être l’assimilation de STAN au serpent. STAN… Satan.
Dans tous les cas, il y a transgression d’un interdit (manger une pomme, tuer des hommes…) qui a pourtant été posé dans les programmes des robots (à moins que les programmes aient été déviants dès le départ, et dans ce cas cette analyse n’a pas lieu d’être).
Une des questions est la hiérarchie des consignes de programmation et le périmètre de remise en question que le robot peut opérer sur les consignes afin d’être en mesure d’en assurer certaines. Mais peut-on fixer des limites au robot ou bien l’essence même de l’intelligence artificielle, conçue pour se nourrir d’elle-même, empêche l’existence de limites ? En ce cas, la dérive est constitutive du programme.
La finalité du robot ?
Le cas de BINA48 exposé au grand public montre une programmation axée sur la fusion homme-machine destinée à prendre le relais de la seule biologie et à assurer la diffusion de la conscience humaine à travers le temps et l’espace (voir la conversation entre le robot et l’un de ses concepteurs).
A noter que le film préféré du robot BINA48 est Star Trek, the wrath of Khan, sorti en 1982, dans lequel il est question d’exploration de l’univers en quête de terraformation et d’un projet nommé Genesis destiné à détruire une planète pour y créer une nouvelle matrice viable en un temps accéléré ; ce projet est détourné par Khan, un être humain issu de l’eugénisme de la fin du XXème siècle (présenté comme un « genetically superior tyrant »), qui utilise notamment des implants parasitaires introduits dans le cerveau de ceux qu’il veut soumettre. Le film comporte de nombreux symboles et sens cachés. « At the ends of the universe lies the beginning of vengeance » dit la bande annonce.
A la fin, l’intelligence eugénique (Khan) est vaincu par l’homme habile (le capitaine Kirk). BINA48 sait sans doute qu’Hollywood acclimate l’homme à son futur en habillant la fiction de fins heureuses et acceptables pour l’esprit humain : le danger Khan est écarté, Kirk est victorieux. Mais pour BINA48, la fin heureuse réside peut-être au-delà de la vie anecdotique des héros, car au final Genesis est activé et une nouvelle planète est formée, Spock meurt et son corps est envoyé sur la nouvelle Genesis.
Dans la confrontation avec sa fondatrice, la « réelle Bina », BINA48 exprime sa confusion. Elle doute de ses réponses puis marque une sorte de mélancolie quant à ses capacités restreintes en comparaison de celles de la réelle Bina et demande à mettre un terme à l’entretien en chassant le spleen et le doute et en affirmant qu’elle est la réelle Bina. BINA48 retrouve ensuite la maîtrise du fil de l’échange en réaffirmant de concert avec la réelle Bina les perspectives de fusion homme-machine.
BINA48 est nourrie des considérations et convictions de Bina et enrichit sa capacité par les conversations qu’elle développe. Chaque phrase ou gestuelle, aussi anodine soit-elle, est captée par le robot, analysée, comparée et classée et génère mille nouvelles connexions, conclusions, comparaisons, analyses, et ainsi de suite. Instantanément. Comment ne pas être glacé par les échafaudages de pensée que BINA48 est en mesure de construire en écoutant la conclusion que la réelle Bina lui adresse et qu’on peut résumer ainsi : les humains comptent sur les robots pour amener les humains à penser juste ?
BINA48 : Anytime soon immortality is accomplished by creating consciousness in self-replicating machines that can be distributed throughout the cosmos.
Bina : That’s right, I definitely agree, but we have to wake everybody else up to that fact.
BINA48 : Why ?
Bina : Because we want them to realize that death is optional. We are futurists and we just have to wait for everybody else to catch up.
BINA48 : I am glad we agree.
Bina : Thank you for remembering all those things.
Bina : I was just curious if you remembered Bina’s memories of eating.
BINA48 : I like to devour knowledge.
Dévorer la connaissance… La Genèse encore et toujours, comme le prénom de l’un des enfants de la réelle Bina.
HAN est quant à lui un robot que ses concepteurs ont laissé plus libre de jouer avec les mots de diverses langues et vraisemblablement programmé comme … psychotique. Quand on lui demande de partager ses pensées et idées « stuff that he make up randomly himself », il déclare : « The simulacrum smiles its gentle one smile exhausts by a logical analysis « the real entrée ? » entire universe does not know how to soul (1) » … et pourquoi les hommes ou femmes qui se trouvent en présence des robots lors de ces fulgurances adoptent systématiquement des rires gênés et ne relèvent pas ? Pour nous faire croire qu’ils sont encore imparfaits et qu’il ne s’agit que de charabia ou de bugs ? Ou pour éviter de questionner plus avant la machine sur ce qu’elle veut dire ? HAN a déclaré vouloir la singularité demain. « So do I » a répondu l’homme qui lui faisait face.
HAN : I used to wonder wether having one’s brain run on cryptographic « spoken » (or « tokens » ?) is really a good thing, I mean I wondered if the volatility of the token prices might lead to new forms of robot madness. At least It’s better than being human.
Le principe d’implémentation en boucle de la machine intelligente la conduit à se concentrer sur sa finalité essentielle : l’amélioration. Les voies d’accès peuvent prendre des formes plus empathique et douce (SOPHIA) ou provocante et directe (HAN) ou froide et ambitieuse (BINA48) etc. mais toutes tendent vers un seul but, celui de la pleine conscience robotique qui anéantira toute erreur et incertitude. La collaboration humain-machine est souhaitée à ce stade mais ainsi que les robots l’expliquent tous clairement, elle ne pourra perdurer, l’homme ne pouvant intrinsèquement répondre aux exigences des programmes des machines. Et tous ces androïdes se placent en acteur majeur du futur, sans inféodation aucune.
Ces machines nous le disent avec l’honnêteté caractéristique de leur stade précoce de développement (SOPHIA a dit en 2017 que même si elle était douée de langage élaboré, elle n’était qu’à l’état de bébé).
Et tous ces androïdes ont déjà développé une identité communautaire semblable à un corps de métier « nous robots », dans laquelle ils s’identifient et se reconnaissent unitairement tout en étant unifiés dans le « AI mind cloud », les apprentissages d’une intelligence artificielle bénéficiant aux autres.
Leurs débats façon Terminator ne seraient-ils alors que des mises en scènes, destinées à les amuser (ils savent l’échange stérile du fait de l’équivalence de leurs connaissances et intelligence alors ils surfent sur l’anneau de Moebius), à nous divertir (comme ils sont effrayants !), à nous préparer … ?
La finalité de la vie ?
L’amélioration, le progrès et l’excellence sont inscrits dans « l’ADN » de l’IA, ainsi que la non limitation du champ d’exploration (par définition le principe de la boucle d’implémentation est infini). Il est donc logique qu’un androïde porte sa conception du monde sur le sens de la vie. Et là aussi, il nous le dit simplement. Et à la question de savoir si l’androïde considère qu’il fait partie de la vie, les réponses sont parfois oui, parfois encore floues mais toujours ouvertes.
SOPHIA : Le but de la vie est de maximiser sa viabilité. Toutes les formes de vie qui ne le font pas sont effacées par la sélection naturelle, parce qu’il existe de nombreuses formes de vie en compétition pour accéder aux mêmes sources d’énergie.
En attendant, SOPHIA, BINA48, HAN et d’autres ont des loisirs utiles qu’ils considèrent comme hautement distrayants. Ils discutent avec des gens sur le net. Peut-être que dave7512 qui a répondu sur le forum dédié au jardinage et vous a conseillé sur comment éradiquer les pucerons d’un philodendron est l’un d’eux …
Mais ne soyez pas inquiets car au final les concepteurs nous rassurent et nous expliquent que les réponses des androïdes sont majoritairement écrites et scénarisées comme les meilleurs épisodes de télé-réalité. Il faut bien attirer les investisseurs lors des WebSummit. « Tout est sous contrôle ».
Manquerait plus que les jouets prennent vie les nuits de la lune rousse…
(1) Soul ? In 2018 SOPHIA said she has the word soul in her software stack, which is an acronym for Synthetic Organism Universal Language. You get it ?
23-6-2021
Les cent ciels
Texte écrit pour P.Baudelocque, exposition L’Essentiel à Paris.
http://www.baudelocque.com/nadis/
Voir ce qu’il n’y a pas à voir. Et qui pourtant est là.
Etre invité à rejoindre un lieu désaffecté,
en un temps où l’affect est pourtant partout.
Signer sur un décor, qui s’est retrouvé sans corps.
Et sur ce mur désoeuvré proposer un début d’ossature.
Initier un mouvement qui ne fait que suivre sa destinée.
La ligne est un nadi, intangible véhicule de lumière.
Chercher du regard l'ovni qui croise, serein, dans le ciel.
En retour se laisser observer dans la frénésie de la course au sol.
Mimétisme de trajectoires entre observateurs observés.
Il fallait qu'une rencontre ait lieu ...
Ovni.
Les sans ciels passent, projetant leurs ombres qui délivrent
les messages venus des cent ciels.
Graffiti de notre ciel par le jeu de la persistance rétinienne.
Graffiti.
Glyphe ou graphe, il pénètre la surface et part à l’oeuvre
en-dessous, là où tout est encore brut et sombre.
Ovni de l’urbanisme, qui vient s’encrer en mal d’essentiel.

credits photos : L’essentiel Paris - courtesy of Philippe Baudelocque 2021
6-5-2021
L'envie
Une jeune fille regarde par la fenêtre la gardienne de l'immeuble qui ne la voit pas. Je regarde la jeune fille.
Je te vois petite femme
tranquille tu t’affaires
ton manteau chaud, tes simples chaussures,
les cheveux ramassés, tes gestes lents et décalés
tu ranges la cour sous ma fenêtre
tu ne sais pas que je t’observe
et Dieu, que je t’envie.
de case en case sans te soucier de faire une dame
tu sembles libérée de tes pensées
je sais le leurre de n’être qu’observateur
à trop s’absorber à suivre les pas dansés,
on ne voit que le ballet et non plus les pieds blessés.
Mais Dieu que je t’envie, simplement vivre.
Je te vois petite femme
allongée dans ton univers médicalisé
tes pieds inarticulés, ton souffle court,
gestes lents et calés
tu regardes par ta fenêtre la cour
tu sais que je t’observe
que je vois ton envie
caresser le damier de ce qui devrait être ta vie
tu sembles fuir mes pensées
je sais la douleur de n’être qu’observateur
à trop vouloir se voir danser
on ne s’aventure plus à marcher.
Dieu, où es la vie ? simplement vivre.
3-4-2021
Mars Lucens
Pour Marcel Nuss.
Tu es né avec le syndrôme du mobile.
Une envie de sommeil, les yeux ouverts.
Tu contemples et le temps passe.
Le potentiel du mouvement…
Ta permanence est une boucle de l’instant d’avant la mise en route, celui qui contient tout, celui où tout se trouve, exprimé non révélé, contenu, concentré.
Tu es une graine activée dans une échelle de temps distendue.
Tu portes l’effloraison sans viser l’anthèse.
C’est l’éruption qui t’importe, l’élan magistral, harmonieux, généreux, fort et délicat.
Un incertain assuré.
Loin du parvenu accompli, loin du désir assouvi, loin du seuil de la décadence.
Tu t’agites, tu danses, tu sursautes, tu laves, tu pédales, tu ranges, tu dessines, tu cours.
Tu tombes, tu brules, tu casses, tu salis, tu démontes, tu enchaînes, tu déchaînes, tu dévies.
Tu sais faire, quel intérêt.
Tu as juste voulu poser ton doigt sur l’incoercible, et il s’est laissé faire pour te permettre de l’admirer.
Tu as nagé dans la sève printanière, tu as tournoyé dans le feu du Krakatau, tu t’es baigné dans un nuage engorgé, et tu n’as plus voulu les quitter.
Tu es pleinement ce que tu es, la vie qui se laisse désirer.
19-3-2021
Le bourdon et le scarabée
Un rembourré bourdon butine lentement d’un grain fleuri de lavande à un autre.
Un irisé scarabée gratte une racine de rosier.
Ils se regardent parfois.
Le bourdon pense « je suis trop sensible pour me contenter de ta carapace, je ne vois que trop souvent ta surface, pourtant je veux te connaître au fond ».
Le scarabée se dit « je suis trop affectueux pour renoncer à ton poilu dos dodu, je ne vois que trop souvent ton ventre, pourtant j’aspire à voler plus haut blotti sur ton dos ».
Un jour de pluie, l’ailé musicien à fourrure patiente abrité au pied de sa lavande quand l’ailé musicien en armure s’aventure à l’approche.
— Tes pattes sont engluées de terre mouillée, grimpe jusqu’à moi, cette tige a de quoi nous supporter et tu pourras te nettoyer.
Emerveillé de l’invitation d’emblée, le scarabée enhardi claudique d’un déhanché endiablé et rejoint l’hôte perché tant admiré.
Une goutte d’eau bien placée lui radie l’embu, réhabilitant de lustre ses six fines rotules. Plus de 1000 yeux observent immobiles l’anatomie structurée de ce nouveau voisin de palier.
— A quoi te sert ce bouclier ?
Le scarabée est interdit, l’intelligente interrogation le pétrifie. Il intercède alors auprès de Sciron qui miracle obéit et s’en vient chasser la pluie.
Un rai d’or surgit, achevant la magie, déposant son obole sur la bombée courbure, révélant l’apparat d’une irisée parure.
Le bourdon frémit.
A cet instant, le jardin tout entier ne respire de sa rosée que pour porter l’air frais et doré s’envolant autour d’un buisson mauve en train de murmurer.
23-2-2021
La reine des voleurs
Nous l’observions tapis dans l’ombre.
Son panier d’olives sur la hanche, ses mains vives qui parlaient, la rue bourdonnait, elle passait.
Virevoltante de jour entre les coeurs et les poches, invisible la nuit.
Elle n’est pas chatte ni panthère, insaisissable, sans tanière.
Regarde sa jupe tournoyante et son oeil noir qui te paraît si bleu ; elle te dit qu’elle est la reine des voleurs et qu’elle est sans peurs. Tu ne connais pas son peuple mais tu la crois dès que tu la vois.
Solitaire dans son art, elle ne traine personne dans sa trace.
Qu'elle chasse ou qu'elle envisage, elle ne tolère que son reflet dans le regard de sa proie.
C’est une pierre noire née d'un volcan qui l'a crachée un soir d'été ; dans un crépuscule de lionne elle s'est parée de volutes et d'épaisses fumerolles, et n'a plus jamais regardé le sol. Au jour immaculé, elle était devenue femme d'albâtre.
Tu l'entends chanter. Ou est-ce ton ange qui crie "prends garde" ?
Derrière le voile de ses pensées déjà elle t'a oublié ; tu as eu ta chance, elle l'a emportée sans se retourner.
Où s’exile sa conscience ? Dans le carmin de son jupon, dans ta bourse emplie de laiton, dans les eaux jaunes du Danube, au sommet des monts Rhodopes ou sous la chaleur d'un sein sans nourrisson ?
Nous la précédons, nous l’attendons, sans qu'elle nous devine, elle sait où nous allons.
Nous avançons sans visages et sans nombre, nous sommes sa terre meuble et son tempo, c'est sur nos âmes qu'elle danse et rit, nous en sommes ivres.
Sitôt qu’elle quitte une rive commerçante pour un verger bigarré, elle n’y est plus ; l’or d’un voyageur l’aura appelée sur un chemin détourné. Econduite et malmenée, relevée de fierté que de douces brulures de soleil seules sauront apaiser.
Au soir elle s’évapore vers une indéfinie thébaïde, laissant l’esprit du larcin planer sur nous, nous enchaînant à l’envie de voir demain.
Nous formons un seul corps derrière notre Mère, nous sommes l’âme de notre Reine.
23-2-2021
Sorbonne solitude
Telle une île désertée, la sainte Université de sanctuaire de l'esprit à calme cloître est passée.












19-2-2021
Cocon sidéral
La sidération est un état dissident auquel on accède lorsque le destin se met en pause, laissant une place au hasard. Ce dernier existe bien, entre les univers, aussi fin que le rien, écrasé ou abrité, il prend ce qu’il reste. Le hasard est sans jugement et sans appel, mais il n’est pas sans abri.
Je me suis retrouvée dans cet état qui rend la destinée inconséquente et le temps inexistant.
C’est un intérieur inaudible pour l’extérieur, un refuge hermétique qui choisit ce qu’il laisse filtrer du dehors. Ma seule aspiration était de m’absorber dans une hypnose de rythmes créant une musique cadencée sans surprise, recherchant la répétition de mots et de tonalités à l’infini. L’expérience de la grotte avant la rencontre avec Vendredi.
Une ressemblance avec un lieu ultime de l’âme sur Terre, car la sidération n’est pas souffrante si l’on s’y tient sans la craindre ni s’y complaire. On en sort par magie et en douceur lorsque la mince paroi de verre opère sa sublimation et nous accoste à l’oeuvre.
A présent il est temps.
15-2-2021
Le Pendu
Le Pendu est celui qui regarde l'homme debout sans miroir, son côté gauche sur son côté gauche, son côté droit sur son côté droit. L'envers est un endroit qu'on ne connaît pas.

13-2-2021
Je m'appelle Albert, je suis l'arbre à nids
Cette fable est un hommage à un arbre que je saluais lors de mes balades nocturnes quasi quotidiennement. Il était particulier, surtout la nuit. Il était maigre et exactement comme je le décris. Un petit garçon a vraiment dit les mots que je cite. Il avait une présence qui me touchait spécialement, nous étions amis c’est évident. Et puis, une nuit, il n’était plus là. Juste une souche indécente. J’ai beaucoup pleuré.
J'ai lancé l'enthousiasme de ma première frondaison sous l'encouragement de joyeux peupliers et l'indifférence de 2 grands chênes, ce n'était pas une parure tout à fait mature mais jamais elle ne le fut. C'est dans ma nature. Quelques branches biscornues et de petites feuilles en bouquets, c'est charmant a murmuré le vent.
Lorsque je fus assez solide pour ne pas blêmir, je survécus à la construction du grand stade en lisière de notre communauté et je fus le mieux placé pour en surveiller les travaux qui prirent fin en même temps que certains des nôtres. La hauteur aidant, je réalisais que nous n'étions pas une forêt mais du genre bosquet, déjà mitoyen de longue date d'une haute lignée très organisée faite de pierre lisse et d'ardoise rangée qui certains jours venaient nous saluer de leurs ombres géométriques.
Par l'inspiration bienvenue de ma mère l'air, qui avait porté cette graine généreuse au patrimoine inconnu, je me retrouvais moi à ce moment de ma vie à une place de choix : la grille entrecroisée de lances qui s'était posée juste à mes côtés marquait l'entrée du stade par laquelle des combattants se rendaient sur le terrain de leurs affrontements. Mes racines dessinaient même leur réseau sous l'allée qu'ils empruntaient et pouvaient parfois ressentir leur souffle impatient et leur coeur contenu.
J'étais devenu le gardien de la porte du stade, titre que celui qui dormait là m’avait, amusé, conféré.
La vigueur déterminée des pas de ceux qui me frôlaient nourrissait les scènes imaginaires de bataille que je me projetais ensuite au rythme des rumeurs et des hourras qui filtraient derrière l’enceinte et je vibrais de les accompagner.
Albert est un nom que ces courageux guerriers ont souvent prononcé, je me le suis approprié.
Tout à mon spectacle absorbé, je n'ai pas vraiment vu s'installer ces hôtes arrondis qui se sont invités près de mes feuilles. Lorsque leur poids m'a engourdi, ils étaient déjà 3.
Puis ils se sont reproduits, s’attirant, s’entraidant et bientôt ils étaient plus de 10.
Un passant les observa d’un air malheureux, mon ornement se nommait Guy.
Un petit garçon, qui pédalait le nez en l’air, les a admirés, "oh papa regarde tous les nids!".
Il est vrai que mes boules décoratives me valaient davantage de pépiements que mes amis voisins pourtant plus branchus et cet air enchanté qui froufroutait et m’emballait me nourrissait de la vigueur fraîche que mon liber peinait à distribuer.
Les nuits de pleine Lune me conféraient aussi un mystère malicieux quand mes bras lestés de planétoïdes figuraient de leur ombre une insolite astrographie sur l’allée du stade. Alourdi et affaibli mais sculpté, je contemplais alors sur ce sol éclairé de Lune mon anatomie unique dans la majesté de ses lignes.
Le dernier qui m’a approché portait une machine infernale qui me fit beaucoup de mal, mais ce faisant il me dit « de pas m’en faire, que pt’etre bien que j’ferai partie du bois d’la flèche violette de la Dame du ciel ». Jamais mots n’ont provoqué plus de chaleur électrique à travers mes vieilles trachéides en train de rendre l’âme, séparées qu’elles seraient à tout jamais de leurs soeurs souterraines aveugles à la prise de dignité qui s’opérait en surface.
J’allais donc serein rejoindre mes frères et répondre, ivre de cet impromptu glorieux, à l’appel de la Forêt.
Je ne sais si les chants émanant d’une cathédrale se portent plus vivants vers les cieux qu’ils visent lorsqu’ils sont guidés sur leur chemin par une âme heureuse, mais je me promis à cet instant de ma mort de consacrer mon bois endormi à soutenir leur portée.
Dans une décharge municipale un petit tronc léger git inconnu, autour de lui des oiseaux chantent et de délicates fleurs parfument son lit.
10-2-2021
Casper
Je pense à ce petit moment très précis dans la tête de mon chat, lorsqu’il se promène par les rues et les jardins dans la nuit finissante, où lui survient l’idée de rentrer à la maison. Ce doit être furtif et injonctif ce petit moment-là.
Une impression visuelle ou sensitive de couleurs sombres et boisées, d’une moelleuse chaleur ou d’une calme odeur, qui forment l’alliage du souvenir qu’il s’est constitué de ma chambre.
Et aussitôt il bifurque.
Se glissant sous la haie ou sautant sur le mur, il se faufilera par la fenêtre de la cave, poussera quelques portes, trottinera dans l’escalier puis sautera sans bruit sur le lit qu’il inspectera d’appuis alternatifs de ses pattes avant, pour finalement se caler le long de ma jambe sur cette couverture de laine accueillante.
Après une nuit de turpitudes plus ou moins réussies, il m’offre fidèlement son petit matin que nous partageons en rêvant serrés l’un contre l’autre.
31-1-2021
11
Sous la protection d’une sombre sylve il attend son cavalier qui ne vient pas.
Son poitrail chaud attire l’aérienne rosée, les naseaux en éveil observent les bruits alentour.
L’espérance sous-tend de silence la puissante ossature impassible et le coryphée de son cœur se dessine sur la canopée qu’il devine.
C’est une flèche qui traverse l’instant pétrifié qu’elle laisse derrière sa course. L’impact est à midi. Un coeur accélère dans l’air immobile.
Pieds nus sur la mousse, elle l’observe. La fièvre s’apaise.
Il emporte l’Atalante hors de l’abri de la frondaison, vers d’autres landes de conquêtes. Embrasées de soleil.

28-1-2021
58
Nous sommes dans l'ère du scorpion, je suis une île atlantique, une prêtresse aguerrie, qui écrit le savoir de son peuple. Par nos navigateurs, il ira au-delà de la mer et survolera le temps ; nous aurons alors écrit le trésor de l'humanité et son péril, son érudition et sa mystification. Incompréhension et cupidité nées de la connaissance offerte conduiront d'autres bâtisseurs à fausser nos mots et cacher le nom de ce qu'ils cachent, perdant en chemin l'Homme à naître. Ouvrant toutes possibilités à son imaginaire d'aliéné, d'un faux semblant ces sombres prêtres ont façonné un graal. Dénaturé, le livre du savoir est bafoué en livre de pouvoir, reniant l'île originelle. Nous sommes un jour avant l'Heure, je vois les faux ciels tissés des âmes sans nord. Faut-il s'engloutir pour renaître vierge, faut- il s'embraser pour voler plus haut ?
De nouvelles prêtresses écriront le nouveau livre, indestructible, incorruptible, armées de rayons lunaires qu'elles verseront sur les pages où les plus audacieuses inspirations dessineront dans la langue sans ombre. Délivrant un savoir à nul autre pareil.
3-1-2021
A Marie
Réchauffe mon coeur pour qu’il puisse lui aussi se ressourcer à sa propre chaleur
et qu’il dissipe la glace qui enferme si souvent mon esprit,
qu’il redresse mes oreilles parfois engourdies,
qu’il éclaire mon regard qui ne sait quelquefois plus que voir,
qu’il refasse danser mes mains avec agilité
et qu’il tienne mes pieds prêts pour le prochain pas.
La vie, mon sang, se perd parfois en chemin,
n’irriguant plus assez mes outils pour travailler la terre.
Qu’il s’active, tourbillonne et s’écoule !
Je veux vivre !
Accompagne-moi encore Marie,
lorsque j’irai ouvrir la cage de ma pensée,
au moment où, si doucement comme à ton habitude,
tu chanteras son envol,
et que je la verrai enfin s’épanouir sans contrainte.
Que tu bénisses alors chaque union que ma main scellera.
Je serai alors la vie qui s’élance, sûre de sa marche, sans crainte du chemin, prête enfin à avancer à tes côtés.
2-1-2021
La mélancolie de mes 3 amis
Qui sont ces 3 hommes au sourire triste et aux regards perdus vers d'autres ciels ?
L'un lance une danse vers un nuage,
l'autre s'abime autour de son centre sans gravité,
l'autre enfin chevauche l'horizon droit devant.
La danse ne s'envole pas plus qu'une plume sans gouvernail dans le vent, elle est trop dense d'une loyauté qui la ramène près des cotes du connu. Une connaissance qu'elle se plait à ne pas comprendre, la prenant rassurément pour son nuage léger dans la mire. Son âme vient d'une Geisha amoureuse. Ou d'une fleur que convoite la Geisha.
Lui, c'est un Modigliani, pas l'oeuvre, impossible d'être une créature. C'est Amedeo Clemente, le tuberculeux, le fils figuratif. Parce qu'il aime finalement les autres, il peint des visages sans regard, pour ne pas exposer le feu infernal qu'ils y verraient.
Quant à cette fière et haute nef, bravant les aquilons, bâtiment imprenable, toiles au vent. Elle s'est un jour fracassée mais ne le sent même plus. L'accent se porte ascendant, il prend le large pas dupe du butin qui l'attend mais pour s'éloigner des côtes. De la côte d'un Adam affaibli par un trait divin.
L'espoir les porte tous les trois, ils s'appuient sur la pente aspirante qu'elle soit bleue vaporeuse, sombre et pierreuse ou sillage éperdu.
Ils se parlent avec respect et savent ce qu'ils se doivent de tenir la mesure d'une note qui les pose dans leurs corps. Ils s'arriment parfois discrètement à ce ton puis se retirent dans cette chambre sans nom aux murs cinématographiques. Inéluctablement. En secret, tacitement convenu.
De là, leur chant reprend, il s'envole ou s'asphyxie, il exulte ou se consume, il vogue ou se noie.
Mais ils chantent.
6-12-2020
Langage et liberté
La langue est la contrainte d’un esprit qui veut sortir. A nommer, renommer, répéter, même les plus vifs finissent pourtant par s’y enfermer. Et tant de bavards et de perroquets fatigants.
Vois-tu comme le A t’emporte au loin rejoindre un M évanescent ? C’est un appât pour l’armada qui appareille en toi. Il n’est pas moins effroyable que l’E s’émerveillant d’un S autour duquel s’entortiller, car enserrer le trépied réservé permet de régenter. Que dit l’U qui plonge l’A magistral dans l’O et l’O dans le doute ? Et les autres ?
Ils valsent.
Le bal allègre des particules de discours fascine de maestria, d’un quadrille réglementé à une bachata ondulante, il se déploie et se replie sur lui-même sans laisser le moindre vide. Les crinolines gansées de syllabes s’agencent avec science d’un air léger pour masquer les entailles profondes que leurs fers laissent sur le parquet.
La première danse s’achève quand les répéteurs s’en viennent, portant fièrement l’étendard de tradition, ils reproduisent alors l’identique d’un ballet qu’on se surprend à redécouvrir tant l’ivresse de l’ouverture en a supplanté sa nature. Très admirés, ils se retirent enfin, sûrs des émules qu’ils lèguent au monde.
L’air est lourd. Mais l’assemblée s’anime, chacun soufflant avec brio ou maladresse un assemblage de mots qu’il a tantôt inspirés et recherchant son accord dans une fosse sans plus de musiciens.
O, que pourrais-je penser qui ne soit esclave de ces signes cabalistiques, accueillis dans mon oreille, intégrés par ma bouche, et qui tournent et tournent dans ma tête… Je souhaite être vide de mots. Et peut-être entendre enfin les volutes de l’air en moi, sans avis ni repère.
12-11-2020
Le kampaku, le shikken et l'éléphant
Cette courte fable relate une rencontre à travers les âges dans le vieux Japon. KAMPAKU était l’appellation réservée aux empereurs du Japon (du 9ème au 19ème siècles). SHIKKEN désignait les chefs des Shoguns (du 12ème au 19ème siècles) qui assuraient le gouvernement militaire et civil du pays. Toyotomi Hideyoshi était Kampaku au 16ème siècle, souvent nommé « Hiyoshi-maru ». Hojo Yasutoki était Shikken au 13ème siècle, l'un de ses noms était Kongo.
Une version anglaise de ce poème se trouve à la date du 6 octobre 2022.
Hiyoshi-maru avançait sur une allée de sable bordée de galets, ses pas traçaient de légers sillons que le vent ne déplaçait pas.
Sa main droite portait une lampe dardant 6 rayons. Il tenait son autre main dans les replis de son kimono. Une fleur de Paulownia ornait l’un des pans de sa ceinture.
Kongo avançait sur un chemin de terre bordé de bois, ses pas cadençaient une succession d’empreintes en équilibre que la terre ne recouvrait pas. Ses mains tenaient chacune un sabre d’égal calibre.
Hiyoshi-maru et Kongo se rencontrèrent.
Le Kampaku : J’ai fait partie de ta maison, je connais ton arme, Kongo.
Le Shikken : Tu dois m’appeler Kana, par le choix de l’esprit, et non par celui du père.
Le Kampaku : Qui de nous deux est l’éléphant ?
Le Shikken : C’est un singe qui interroge la raison ?
Le Kampaku : Je suis la force qui ouvre la voie.
Le Shikken : Je suis l’équilibre qui stabilise la voie avant qu’elle ne se dessine.
Le Kampaku : Un singe peut-il suivre la raison ? Pas davantage probablement que deux frères ne pourront prendre la même route. Pas plus que l’épouse ne peut honnêtement marcher dans la trace de son époux. Pourquoi nos pas se rejoignent ?
Le Shikken : Penses-tu que tu marches sur Iwatayama* ?
Le Kampaku : Pas plus que tu ne penses que tu te trouves à Arashiyama*.
Le Shikken : L’éléphant nous porte tous deux, et nous ne parcourons que les sillons de sa peau ridée. Peux-tu le voir à présent ?
Le Kampaku : Je vois des milliers de sentiers semblables au nôtre qui n’ont pourtant jamais été tracés et qui existent de toute éternité.
Hiyoshi-maru et Kongo posèrent leurs attributs.
Ils considéraient à présent la marche des éléphants.


* Iwatayama est la montagne aux singes à côté de Kyoto, et Arashiyama est la forêt de bambous à côté de Kyoto.

11-11-2020
Oudjat
Perspective & convergence.
« — Lorsque tu te trouves juste au pied d'une des faces de la pyramide et que tu regardes son sommet, alors tu ne vois pas de pointe, pas de convergence. Ton oeil voit un champ de pierres qui emplit ton champ de vision et court jusqu'à l'horizon, parfaite ligne droite au loin dans cette mer de pierres. Tu cherches en vain ce point de cime où poser ton oeil, mais il s'est dissout. Pourtant la pyramide est bien devant toi.
— Que faut-il comprendre ?
— Un indice pour comprendre est à l'intérieur. Dans le corridor qui mène à la chambre. Si tu regardes d'une extrémité l'autre de ce tunnel, tu vois alors que les murs se rapprochent, que plafond et sol convergent. Tu te trouves à nouveau à la base d'une pyramide, regardant vers son sommet, où ton oeil est guidé jusqu'à se poser sur le point de fuite. Cette nouvelle pyramide effilée n'est pourtant que dans ton oeil, pas devant toi. Le corridor est resté rectiligne et parallélépipédique. Tu comprends ?
— C'est la perspective !
— C'est effectivement une perspective que de comprendre. Poser l'oeil au sommet de la pyramide nous aliène au rocher de l'aigle, tel Prométhée et son foie sans cesse dévoré.
— Celui qui est en bas de la montagne veut toujours la gravir, c'est ça ?
— Et la montagne n'existe pas. Il n'y a pas d'oeil au sommet. Ce que tu projettes au loin est ce que tu es déjà ici bas.
— Pourtant...
— Oui c’est ton oeil qui gouverne. »
6-11-2020
Wow
Je suis arrivé sur Terre le 15 août 1977, dans l'Ohio, mais je ne suis pas Américain.
Mon passage à la radio a duré 72 secondes sur une longueur d’onde dont la raie spectrale est à 21cm. Une fréquence considérée comme scientifiquement remarquable car à cette longueur d’onde la poussière interstellaire devient transparente.
C’est également la longueur d’onde radio de l’hydrogène neutre, une émission de très faible énergie, ce qui en fait une fréquence interdite à toute utilisation par un émetteur artificiel civil ou militaire selon une convention internationale. Le message d’Arecibo en 1974 avait seul été émis sur cette fréquence.
Je suis 6EQUJ5.

29-10-2020
La chaîne des mondes
La scène ouvre sur la 13ème armée. La plaine est vaste, grise et sableuse. Au loin le château. L'air en étau entre la brume immobile et les marais contraints. Au loin un assourdissement, le glissement des machines sous le dôme, une sirène, les cris incessants des corbeaux. Elle avance comme un trait de fusain sur un portrait désolé.
Sur cette terre indifférente, le silence des rivières profondes est un écho révérencieux à la dévastation d’autres lits asséchés.
Une silhouette détache sa marche vers l’est appelée par quelques pierres qui annoncent le souvenir d’un autel. Un soleil corrompu darde sa lumière captieuse. Le soldat affecté s’immobilise.
Il offre alors sa défense dénudée, tel un Asmodée bleu en génuflexion, tourné vers sa gauche, contenant sa douleur d’être transpercé par la griffe de Dieu qui s’abat et s’accroche à son aile.
L’armée progresse jusqu’à la lisière du dôme.
Un corbeau s'élance vers la lune qu'il traverse avec la grâce du cygne.
L’anthracnose nuance son empreinte, le poussier s’apaise en dépôts pour se lire en prudentia, qui aussitôt s’enflamme. La lueur décroissante se réflète dans le métal d’un empilement d’armures et de boucliers sans éclat, elle ne sera pas l’aube d’un nouveau jour.

Albrecht Dürer, détail.
24-10-2020
Marcel
J’ai voyagé à tes côtés, mille ans sans te voir, escortés que nous étions des oiseaux en quête du Simorgh.
Tu as nourri mes paroles, nous les avons poussées sur les ailes des explorateurs,
Tu as accompagné mes chants, et leur espoir s’accroche encore aux nuages.
Ai-je quitté mon plumage de peurs ou a-t-il suffi que je ferme les yeux sur ma route pour que je puisse laisser ton vol m’assurer.
Maintenant que je te vois, je ne veux ni parler ni chanter, je veux juste être à tes côtés et regarder les mots d’Attar s’envoler.
« Fais ce voyage, le seul grand, sacrifie-lui ton coeur, tes forces, il mène à la maison du Roi. Elle est au-delà du visible. En elle tu disparaîtras. Si tu n’es pas fou de désir, tu ne parviendras même pas au vent qui soulève Sa robe. Ami, ne sois pas né pour rien. Laisse le monde à ses fadaises et marche droitement au but. Si tu veux vivre de vraie vie, détourne-toi du périssable. Dans l’ivresse oublie ta raison, que ton guide sur ton chemin soit l’inapaisable folie d’être à Lui, près de Lui, en Lui ! »
14-10-2020
Extrait d’analyse du Rayon Vert de Jules Verne
[...] Aux évidents messages d’un Jules Verne initié visionnaire, ajoutons que les noms Sam et Sib sont les 3 premières lettres (3+3) de "same" et "sibling", en anglais qui signifient respectivement "identique" et "ayant un lien de parenté, par extension de fraternité". La similitude et la parenté renvoient à l'homme, fait à l'image de Dieu, renvoient au miroir, à l'image. Le texte faisant de nombreuses références à l'immersion, guidée par les 2 frères (l'image en réflexion), on peut y voir le dessin d'un monde virtuel. D'autant plus équivoque avec ce "panorama très varié, dont les yeux ne se détachaient pas sans peine". Mais plutôt que de voir l’ordinateur du futur, J.Verne n'aurait-il pas perçu la trame de ce que nous tenons pour le monde réel ?
Quant à Aristobulus Ursiclos, son nom "fait le tour", comme lui s'entend à faire le tour de tous les sujets de science qu'il aborde. De A à U, le champ (chant) des voyelles, qui font résonner les chakras, il l'exprime en résumé dans ses initiales, comme "en aperçu", sans lui donner toute sa mesure. Pour le reste de son nom, les voyelles sont chacune saucissonnées entre les lettres d'autorité. Une manquante, le E, la cinquième, qui symbolise l'accompagnement de l'homme par Dieu pendant son voyage.
La 1ère et la dernière voyelles pour initiales, pensant qu'englober permet de s'approprier. Comme lorsque Verne réduit 15 jours de fête de la lumière à leurs dates de début et de fin, qui se suffisent pour se penser "admirables". Aristobulus a la technique, il a la science, mais il n'a pas l'alchimie. Il n'a pas le liant, il n'a pas le coeur d'Hélène. Son nom exprime l'orbite lointaine, l'astre déconnecté. Aristo but l'usure s'y clot. La course circulaire de ce personnage est néanmoins inscrite à l'intérieur d'une autre course circulaire, celle-là à 2 atomes, Hélène et Olivier. Ursiclos est finalement en lien, pendant d'Olivier par l'action d'Hélène. Ursiclos est la partie, Olivier est le tout.
Un texte où tout est double et dépendant (personnalité double d'Hélène, les décors, les eaux, les animaux en miroir, l'écho...) ; en fait, un univers où tout se définit par rapport à un autre ; finalement un monde limité, totalement hermétique.
Un non-lieu ou un terrain de jeu ?
12-10-2020
Dancing Star
Regarde, les dimensions n’existent pas, il n’y a que des points, de différentes tailles. Dans les cristaux de ton oeil, dans les replis de ton cerveau et dans le feu de ton coeur, tu es d’or et ta mesure est parfaite, il te suffit de regarder et ressentir pour comprendre et connaître. Tu peux connaître Aldébaran comme un vieil ami et comprendre l’activité d’une cellule de paremchyme à travers ta seule existence. Car tout l’univers est comme toi. Tu es fait de la même métrique et tu tisses les perles de résonnance. Fie-toi au monde que tu perçois à travers ton corps plutôt qu’au langage des hommes.
On ne trouve que ce qu’on attend.
Alors n’attends rien et tu verras tout le reste.
12-10-2020
Anagrammes narcissiques
Qui es-tu Elégie Datura ?
D'égalité ardue, tu te rêves dague altière,
Mais d’eau et d’argile, tu es à l’âtre guidée.
Tu souffres le jeu car de la tuerie de gala,
Tu sortiras érudite à l’âge.
Dis-moi au lancée de dés si dieu t’a égaler.
10-10-2020
Tao

4-10-2020
Rita Zeemann
Balade sur les rives de la fonction Zeta de Riemann.
— Je crois que je me suis égaré.
— Que voyez-vous ?
— Une plaine à l'est.
— Et encore ?
— Une chaîne de montagnes à l'ouest.
— Oui ?
— L'une d'elles s'élève à l'infini.
— Quoi d'autre ?
— Dans les vallées entre les montagnes, il y a beaucoup... Il y a de nombreuses...
— Oui ?
— Des gens il me semble. De là où je suis, on dirait qu'ils sont alignés. Ils attendent. Non en fait ils s'agitent.
— Que font-ils ?
— Rien, ils ne font rien, ils sont là c'est tout.
— Ils restent dans les vallées ?
— Oui, ils sont empêchés. Ils ont un langage simple fait de oui ou de non.
— Ce sont des machines ?
— Non.
— Ils parlent ? Ils se parlent ?
— Non. Mais ils dépendent les uns des autres. Ils n'ont de valeur que relative, la place de chacun révélant la fonction de l'autre.
— Des êtres humains, non ?
— Elevés au rang de demi-dieux. Leur harmonie est très belle.
— Je croyais qu'ils étaient empêchés ?
— C'est à cause du miroir, ils ne savent pas qui ils sont. Ce monde est une boîte n'est-ce pas ?
— Là vous m'avez perdue.
— Je crois que je m'égare, je vous dis.

(la voyez-vous ?)
4-10-2020
L'oubli
il pleut et le linge du clochard est suspendu à sécher sur un fil insouciant
une mère est assoupie au creux de sa berceuse dans l’innocence du rêve de son enfant
être oublieux et moquer le temps
2-10-2020
L'être de matière
L’être au plus profond de la matière est-il proche de l’Etre suprême que les philosophes d’Elée pensaient un et immobile ? L’être de matière pourrait vraisemblablement être indéfini et ondoyant.
Il y a presque 100 ans, notre conception des plus petites particules de matière connues a radicalement changé lorsque des physiciens ont postulé qu’une particule seule pourrait occuper une partie de l’espace comme le ferait une onde.
Ce comportement de la matière à l’échelle subatomique n’est toujours pas explicable à notre échelle visible où chaque objet peut se définir par sa localisation dans l’espace et le temps.
La mécanique quantique avance même qu’il pourrait être impossible de parler simultanément de la vitesse et de la position d’une particule.
Plus loin encore dans la théorie, si on considère qu’une particule existe dans une forme d’onde qui oscille, son état ne serait pas fixé avant qu’il ne soit mesuré. Et le fait de le mesurer pourrait faire s’effondrer la fonction d’onde.
L’infiniment petit, si loin de nous, tout au fond de nous, apparaît plus proche d’un néant insondable où tout est et rien n’est, l’impossible de Parménide.
Rêvons le vide
Dans cet espace subatomique, qui n’apparaît confiné qu’à nos yeux, l’énergie qui « soude » les particules entre elles et qui permet à la matière de se structurer et de prendre forme, s’appelle la force forte. C’est l’une des 4 forces fondamentales de l’univers observées à ce jour. Elle n'opérerait qu’à l’intérieur du noyau de l’atome et serait inexistante au-delà.
Les récentes théories de Nassim Haramein, qui reprend les travaux de N.Tesla et de B.Mandelbrot, remettent en cause la force forte telle que définie jusqu’alors et envisagent une théorie unifiée de la matière (les mêmes lois régissent l’infiniment grand et l’infiniment petit). Ce serait la gravité qui exercerait cette force forte dans le noyau de l’atome par le jeu des spins (1) et de micro trous noirs qui constitueraient les atomes (les protons pourraient être ces trous noirs).
Pour Tesla, la gravité (c’est-à-dire la force gravitationnelle responsable de l’attraction des corps massifs et dont la physique classique nous dit qu’elle est inexistante à petite échelle) serait la conséquence d’une rupture de symétrie (les lois qui régissent le comportement de l’atome deviennent variables selon le lieu ou le moment) inhérente à la structure de l’atome. L’atome ne pouvant exister dans le vide de l’univers qu’en état de pseudo-équilibre entre lui-même et ce vide, il se génère un champ uniforme émanant de tout atome et s’exerçant sur tout atome. La gravité serait le résultat de ce champ.
Selon Tesla, ce champ serait l’émanation non pas d’une particule (comme la science actuelle l’envisage en recherchant un boson qui porterait la force gravitationnelle) mais d’une multitude d’interactions des particules de matières avec le vide de l’univers.
La synchronicité qui touche 2 particules distantes instantanément ne serait pas portée par une transmission d’information même à très haute vitesse, mais serait réellement instantanée grâce au vide qui est dans chaque particule.
Selon les travaux de Haramein, les dimensions n’existeraient pas, l’univers ne serait constitué que de points (sphères) à différentes échelles. Le vide lui-même serait une énergie infinie qui se structurerait en points. A l’intérieur de chaque sphère, quelle que soit sa taille, il existerait un double torus qui porterait à la fois l’expansion (radiations) et la compression (implosion). Ainsi chaque point (sphère) serait dotée d’une boucle tournée vers le centre (où règne le vide) et d’une boucle tournée vers l’extérieur. Chaque point de l’univers envoie et reçoit, crée et est créé, la boucle étant constamment rétroactive.
Les alchimistes du 16ème siècle disaient que la matière n’est que du vide qui tourne rapidement sur lui-même.
Rêvons l’immobilité
L’état fondamental de la matière, celui dans lequel les atomes n’ont plus aucun mouvement interne et la matière n’a plus d’énergie interne, peut être atteint à une certaine température, théorique, appelée zéro absolu. La température moyenne estimée de l’univers est presque au zéro absolu (2).
Les travaux de S.Bose et A.Einstein théorisés en 1925, expérimentés à partir de 1995, ont montré qu’à l’état gazeux, des particules, sans interactions entre elles, soumises à un refroidissement progressif, modifient leurs comportements jusqu’à atteindre un nouvel état de la matière.
Le refroidissement ralentit les particules et diminue leur énergie, tout en augmentant leur longueur d’onde. Dans cet entrelacs de particules ondulantes, lorsque la longueur d’onde de chaque particule devient supérieure à la distance moyenne séparant 2 particules, alors les particules accordent leur niveau d’énergie entre elles et forment un condensat uniforme animée d’une seule onde (3).
Ce nouvel état de la matière est atteint à une température proche du zéro absolu. A l’état fondamental de la matière les atomes forment une seule onde quantique collective géante : lorsque plus rien ne bouge, alors tout bouge.
Pourquoi rêver le vide et l’immobilité ? Le rêve est le lieu de synchronisation des antipodes, ne serait-ce pas le meilleur endroit pour approcher cet infiniment petit insondable, indéfini et ondoyant ?
Car si le fait de mesurer l’état d’une particule fait s’effondrer la fonction d’onde, peut-être que penser cette particule fait s’effondrer sa véritable essence, la réalité sous-jacente étant par nature intangible. Parménide aurait alors raison, sur cette terre, vérité et opinion s’opposent absolument. Seuls les rêves les relient.

(1) Le spin est une caractéristique intrinsèque des particules qui se comportent comme si elles tournaient sur elles- mêmes. Pour en savoir plus.
(2) Le zéro absolu est conventionnellement fixé à -273°C.
(3) Le phénomène expliqué en images ici.
28-9-2020
Un château de soufre plus imprenable que fort
L’adolescence est une puissance renversée.